Fréquences TNT : BFMTV promet la stabilité, Kretinsky veut s’appuyer sur son empire médiatique
BFMTV, entre rachat et accusations de « manipulation médiatique », a répété ses engagements d’« indépendance » et de stabilité devant l’Arcom mardi, pour garder sa place sur la TNT, quand Daniel Kretinsky, fort de son implantation dans la presse française, espère s’en faire une avec le projet de « restaurer » le débat public.
Avec ces auditions, suivies de Ouest-France dans l’après-midi, le régulateur de l’audiovisuel se rapproche de la fin mercredi de l’examen des 24 candidatures pour le renouvellement de 15 fréquences de la télévision numérique terrestre (TNT).
« Je suis le bouclier (des) pressions quotidiennes de l’ensemble du personnel politique pour laisser la rédaction travailler », a de nouveau assuré Marc-Olivier Fogiel, interrogé sur l’indépendance de ses journalistes.
Le directeur général de BFMTV est mis en cause par le site d’investigation Mediapart, qui a publié ses échanges de SMS avec l’attachée de presse de l’ancien président Nicolas Sarkozy, dans le contexte de l’affaire des financements libyens de sa campagne présidentielle en 2007, portant sur la diffusion de la vidéo de la rétractation de l’intermédiaire Ziad Takieddine en 2020 et la négociation d’une interview de Nicolas Sarkozy.
La rédaction de BFMTV avait ensuite demandé des explications à Marc-Olivier Fogiel.
« Nous sommes farouchement indépendants (…) Aucun de ceux ici à mes côtés ne m’a jamais demandé quelles questions j’allais poser, nous jouissons d’une liberté totale », a pour sa part assuré Apolline de Malherbe, journaliste phare de BFMTV, en désignant les dirigeants de la chaîne.
Les représentants de BFMTV n’ont toutefois pas apporté d’autres garanties que leurs déclarations de « bonne foi », leur comité d’éthique réuni tous les mois et le renouvellement prochain et régulier d’une charte déontologique, a fait remarquer l’un des conseillers de l’Arcom.
« Notre mission n’est pas de juger ou de commenter, notre mission, c’est de raconter, expliquer et, surtout, veiller à la véracité des faits », a aussi insisté Marc-Olivier Fogiel, contrastant avec sa rivale CNews, qui s’est présentée la veille comme une antenne « de débat », expliquant par là les « quelques dérapages, inconvénients » pour lesquels elle a été sanctionnée par le régulateur de l’audiovisuel.
Pour la première fois en mai puis juin, BFMTV, récemment rachetée par l’armateur CMA CGM, s’est vu ravir la place de leader des chaînes d’information en continu (en parts de marché) par CNews, dans le giron du milliardaire conservateur Vincent Bolloré.
« Restaurer le débat public »
Avec un projet baptisé « RéelsTV », le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, qui construit un empire en Europe dans l’énergie, la distribution et les médias, compte lui se lancer à l’assaut du petit écran français.
Sa société CMI France détient notamment les titres de presse Elle, Télé 7 Jours, Franc-Tireur, Ici Paris, France Dimanche, Marianne, en cours de cession, ainsi que le numéro deux français de l’édition, Editis.
« J’observe avec beaucoup de frustration la détérioration, voire destruction, du débat public », une « tendance négative apportée par le monde d’internet », a déclaré Daniel Kretinsky dans une vidéo diffusée au cours de l’audition, souhaitant avec sa chaîne « faire le maximum pour restaurer le concept original du débat public ».
« RéelsTV », dont l’homme d’affaire sera l’actionnaire, vise à « réconcilier les Français avec le réel » en s’appuyant sur « 3D » : 50% de « documentaires » principalement français et européens, 25% de « débats », notamment dans une émission quotidienne d’actualité de 19H00 à 21H00, et 25% de « divertissement » dans des émissions culturelles chaque soir, a présenté Denis Olivennes, président de CMI France et d’Editis.
À ses côtés, le philosophe Raphaël Enthoven, plume de Franc-Tireur, la rédactrice en chef du magazine Elle, Ava Djamshidi, ou encore Giuseppe de Martino, cofondateur du média vidéo en ligne Loopsider, ont défendu ce projet.
Denis Olivennes projette de s’appuyer sur le « savoir-faire » des médias de CMI France pour alimenter ses émissions en intervenants et productions : « On aura une maison de production (…) mais il est probable que les sujets de la deuxième partie de l’émission (de) débat, sans doute autour d’un ou deux thèmes d’actualité, seront fournis, sous l’autorité de la direction de la rédaction, par Loopsider ».
Du papier à la télé, le groupe Ouest-France candidate lui aussi avec une chaîne « produite en région », depuis Rennes plutôt qu’à Paris. « OFTV sera une télévision nationale généraliste », un « média fédérateur, accessible à tous, créateur de cohésion dans les territoires », selon un communiqué.
Les chaînes retenues seront connues fin juillet.
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