La rédaction des Cahiers du cinéma en désaccord avec les repreneurs
La rédaction des Cahiers du cinéma a annoncé jeudi dans un communiqué qu’elle avait décidé de quitter le magazine, en raison d’un désaccord avec la ligne éditoriale que les nouveaux actionnaires souhaitent imposer.
Les 15 rédacteurs salariés du magazine ont tous opté pour la clause de cession, un dispositif de départ que les journalistes peuvent activer en cas de changement de propriétaire d’un titre.
Une décision qui fait suite à l’annonce, début février, de la vente du magazine emblématique du 7e art, qui a notamment joué un rôle clé dans la naissance de la Nouvelle vague. Richard Schlagman, ex-patron des éditions Phaïdon, qui avait racheté le mensuel au Monde en 2009, l’a cédé à un collectif rassemblant 20 hommes d’affaires et producteurs, dont le fondateur de Free, Xavier Niel, et le patron d’Altice France, Alain Weill.
«Le nouvel actionnariat est composé notamment de huit producteurs, ce qui pose un problème de conflit d’intérêts immédiat dans une revue critique. Quels que soient les articles publiés sur les films de ces producteurs, ils seraient suspects de complaisance», souligne le communiqué de la rédaction.
Les journalistes du mensuel avaient exprimé publiquement ces craintes, et ils estiment qu’ils n’ont pas été entendus par les acquéreurs.
«La charte d’indépendance annoncée d’abord par les actionnaires a déjà été contredite par les annonces brutales dans la presse. Il nous a été communiqué que la revue devait +se recentrer sur le cinéma français+», soulignent-ils, pointant également la nomination au poste de directrice générale de la déléguée générale de la SRF (Société des réalisateurs de films), qui s’ajoute aux «craintes d’une influence du milieu du cinéma français».
Ils reprochent en outre aux nouveaux actionnaires de vouloir faire des Cahiers une revue «conviviale» et «chic», ce qui serait selon eux contraire à son histoire.
«Les Cahiers ont toujours été une revue critique engagée, prenant des positions claires», et «ce serait dénaturer les Cahiers que d’en faire une vitrine clinquante ou une plateforme de promotion du cinéma d’auteur français», préviennent-t-ils.
Ils reprochent aussi la présence parmi les repreneurs «d’hommes d’affaires proches du pouvoir», alors que le mensuel a des positions critiques vis-à-vis du gouvernement. Et enfin, «alors que la presse a été rachetée par les grands des télécoms, et les patrons de Meetic, de Free, de BFM jouent aux business angels, nous refusons cette concentration dans les mains des mêmes de titres jadis libres», disent-ils.
(Avec AFP)
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