Fake news : l’Arcom souligne les efforts des plateformes, mais épingle TikTok
Les plateformes en font-elles assez contre les fake news ? Poussées par la loi de 2018 contre la manipulation de l’information, une dizaine de réseaux sociaux et plateformes, notamment Google, Meta, Snapchat et Twitter, ont dû répondre, pour la troisième année, à l’Arcom sur leur capacité à lutter contre les fausses informations.
Entre un devoir de coopération avec l’Arcom, des obligations de moyens et une transparence à l’égard de leurs utilisateurs. L’Arcom a souhaité tirer de premiers enseignements généraux de plus de trois années de mise en œuvre de la loi et tracer quelques perspectives en matière de lutte contre la manipulation de l’information dans le contexte d’une évolution profonde du cadre de régulation français et européen.
Un bilan satisfaisant, mais pas suffisant
Au travers un questionnaire adressé à 14 plateformes ayant au moins 5 millions de visiteurs uniques par mois, avec l’arrivée de deux nouveaux acteurs : Pinterest et TikTok, l’Arcom évalue l’implication de ces dernières dans la lutte contre la manipulation de l’information.
Tout d’abord, les plateformes ont l’obligation de mettre en place des moyens de lutte : la mise en place d’un dispositif de signalement, une meilleure transparence des algorithmes, la promotion de contenus issus de sources vérifiées, la lutte contre les comptes participant activement à la manipulation de l’information, une transparence renforcée sur certaines publicités et des actions d’éducation aux médias et à l’information. Les opérateurs doivent rendre publics les moyens et mesures qu’ils y consacrent dans une déclaration annuelle communiquée à l’Arcom. Le régulateur souligne les efforts réalisés par la majorité de ces plateformes, mais n’est pas encore complètement satisfait par l’exhaustivité des informations données. « Nous notons un effort de transparence de la part des plateformes, mais le constat est mitigé, certaines plateformes ont répondu plus finement à certaines questions autour de la transparence, tout en laissant un flou autour du sujet de la manipulation de l’information, très régulièrement les données communiquées étaient confidentielles », explique Lucile Petit, directrice des plateformes en ligne de l’Arcom, et d’ajouter : « Toutefois, le cœur de cette problématique ne s’ancre pas majoritairement dans les contenus. Les publicités font également parties de ce bilan. Les plateformes devront être vigilantes, notamment en ce qui concerne les liens intégrés aux vidéos, parfois trompeurs ».
Vers une meilleure coopération, TikTok épinglé
Si les problématiques d’information circulent via les grandes plateformes du web, il est nécessaire selon le régulateur de tenir compte des pratiques de désinformation à grande échelle. L’Arcom encourage la création d’une liste claire de l’ensemble des pratiques portant atteinte à l’intégrité de ces usages. Cela nécessite donc une meilleure coopération à échelle européenne. « L’articulation européenne est perfectible. Chaque organisme s’engage dans ses démarches, mais ces dernières ne se croisent pas. Il est nécessaire d’opérer à échelle équivalente des plateformes mondiales », soulève Benoit Loutrel, président du groupe de travail « Supervision des plateformes en ligne » de l’Arcom. Ce manque de cohérence prendra fin avec la législation sur les services numériques (DSA). Elle remplacera la loi confortant le respect des principes de la République de 2021, le 31/12/2023.
Le DSA donnera un cadre global et évolutif qui permet d’appréhender toutes les problématiques via le concept de « risque systémique » dans toutes les géographies de l’Union Européenne avec le réseau des coordinateurs des services numériques. Elle créera un cadre ouvert qui permet de mobiliser tous les réseaux au sein de l’État, la société civile et du monde académique. Sans oublier le juridique opposable qui pose des obligations de moyens et de transparence.
« Avec l’adoption toute récente du DSA, cette régulation se déploiera à l’avenir non pas à l’échelon européen, mais avec l’échelon européen, puisque le texte prévoit une approche coordonnée de la Commission européenne et des autorités de régulation des États membres », précise Roch-Olivier Maistre, présidant de l’Arcom.
Afin de mieux cerner les problématiques de désinformation, les plateformes vont devoir s’ouvrir aux académiciens. Google lance d’ailleurs cet été un programme d’accès aux données Youtube aux chercheurs. Ces programmes permettront de mieux apprivoiser le sujet pour la société civile. D’autres plateformes ne jouent pas forcément le jeu d’information sociétale, voire de protection. TikTok par exemple, a été épinglé pour son opacité par l’Arcom. La plateforme est restée floue à l’égard de cette initiative, notamment sur la question des étiquettes de contenus provenant de médias ukrainiens, non ceux de Chine, et n’a pas souhaité signer la charte Studer pour la protection de l’enfance en ligne.
Concernant Twitter, le bureau français a confirmé sa volonté de travailler avec le régulateur autour des questions de transparence. Un travail qui ne fait que (re)commencer pour l’Arcom depuis l’acquisition du réseau social par Elon Musk.
Vincent Thobel
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