ENGAGEZ-MOI, SINON RIEN ! Un rendez-vous du Brand(ed) Content, par Laure de Carayon*
QUAND UN SUCCES TV FRANÇAIS INVESTIT LE WEB CHINOIS : «CAMERA CAFE» A L’ASSAUT DES BUVEURS DE THE
Il n’y a pas que les grands du luxe occidental qui performent en Chine. Notre production audiovisuelle s’exporte aussi. «Intervilles» fait un tabac sur CCTV depuis 2004, tandis que d’autres programmes partent à la conquête des internautes.
Nescafé Yunnan Arabica à la conquête de la classe moyenne
La province chinoise du Yunnan, berceau millénaire de la culture du thé, voit la petite graine grignoter ses surfaces cultivables, et les multinationales du secteur (dont Starbucks), se livrer une belle bataille.
Nestlé présent depuis une trentaine d’années et très largement leader (il racheterait la majorité de son partenaire chinois Yinlu Foods Group), y produit son Nescafé Yunnan Arabica avec l’ambition de développer une véritable culture du café en Chine.
La popularité croissante de la boisson, signe de raffinement pour la classe moyenne urbaine, passera forcément par la jeunesse.
Adapter un format à succès est plus prudent
Les consommateurs fréquents et potentiels de café en Chine, ne partageaient à priori pas grand chose; mais les premiers sont carriéristes et les seconds impatients d’en découdre avec l’univers professionnel. Points communs: le bureau, et leur sur-comsommation de vidéos en ligne (index 160).
GroupM s’est rapproché de Robin&Co, producteur et détenteurs des droits de la série Tv culte Caméra Café, déjà vendue dans une soixantaine de pays. Pour son directeur, Nicolas Copperman :«il est difficile en Chine de vendre des formats, et sur le marché asiatique en général, le sponsoring est quasiment indispensable au financement d’une production. Avec Mindshare nous avions tout à la fois le producteur, le sponsor et le diffuseur».
Alors que nous privilégions la création originale dans le cadre de stratégies de contenu, identifier des programmes qui ont fait leurs preuves présente en Chine des atouts certains: notoriété et agrément sont autant du temps gagné, qu’une manière de limiter les risques. Et ce ne sont pas les moindres des arguments sur un territoire aussi vaste et segmenté, où tout va, et doit aller vite, et dans ce cas précis, pour s’imposer au pays des buveurs de thé…
Mateo Eaton, Deputy General Manager Entertainment, Sports et Partnerships de GroupM Chine va plus loin: «le programming online ne fait pas photo. En terme de durée, coût et valeur, les dispositifs de contenus en ligne performent largement plus que les campagnes TV, et offrent le meilleur rapport qualité de contenu/investissement media».
«Nuage de folie à la pause café»
GroupM acquière donc pour le compte de Mindshare (WPP), les droits exclusifs web de Caméra Café, soit, «kāfēi jiān fēng yún» ou «Nuage de folie à la pause café», pour son client Nescafé, avec l’objectif d’en augmenter la consommation, et de divertir les gens pendant leurs pauses. Et prend l’engagement de respecter la bible artistique (Robin&Co a dépêché quelques consultants) et d’adapter 50% des textes français – en deça des 70% habituels, afin de coller au mieux à la société chinoise: trouver une girfriend sur internet- grosse tendance, de l’influence du feng Shui dans la vie quotidienne, etc.
La version chinoise a ciblé un public plus jeune, de cols blancs plutôt branchés, et l’action prend place dans un start-up. Pour la 1ère saison début 2010, 45 épisodes de 4 à 5mn sont produits, et 3 à 5 diffusés chaque semaine sur le site de partage vidéos Youku.com.
Alors que sur le réseau social Kaixin, les fans pouvaient chater avec le casting de comédiens, les internautes pouvaient aussi voter
Résultats: 13 millions de vidéos vues, 115,000 fans sur Kaixin, une augmentation des intentions d’achat de 8%. Un cost-per-click 9 fois moins cher que la publicité en ligne classique. Et une saison 2.
Les chinois aiment participer
Avec elle, l’objectif de dynamiser la série. Les études ont associé les valeurs d’inspiration et d’imagination à la culture du café. La réponse sera d’impliquer significativement la cible pour vraiment la convertir, avec une signature on ne peut plus en phase : «Inspiration Works».
Pour lancer la saison 2 début 2011, re-diffusion de l’année 1 pendant 1 mois, puis offensive sur le crowdsourcing les deux mois suivants: incitation à proposer des scripts, créer des avatars, contribuer au stylisme, à la musique du programme; le gagnant a joué dans plusieurs épisodes. Enfin, diffusion de la série le quatrième mois sur le réseau social QQ.com (Tencent), à raison de 35 épisodes de 4’ environ, 10 ont été diffusés chaque semaine. L’ensemble disposant d’un soutien media et sur le point de vente. Un budget sensiblement identique à la saison 1 (efforts supplémentaires apportés à l’écriture), et des résultats plus performants encore.
La saison 3 est signée. Nescafé Chine veut une «énorme» campagne en 2012. Il est prévu d’intégrer des guests, de faire un roadshow sur les campus universitaires… Et si la marque poussait les limites du crowdsourcing à l’instar de HP en Chine en 2010, en produisant avec les internautes, un long métrage, comme son «parrain» français (Espace Détente) ?
Pour mémoire, «Brand Content: Special Chine»
–1/4 De la vulgarité à la télévision, de Mao Zedong et des cosmétiques (Yue Sai/L’Oréal)
–2/4 De la Guerre de l’Opium, de thé, de café et d’alcool à la TV (Martell)
–3/4 De Confucius, de la vieillesse et de Whoopi Goldberg (Tena)
–4/4 De la jeunesse, d’empowerment et de tapis rouge (HP)
* Laure de Carayon intervient sur les contenus de marques depuis 2002. Elle est consultante, productrice et speaker Brand Content. Elle fut notamment directrice conseil de Granit Productions, structure de production déléguée de programmes courts TV du Groupe Carat.
twitter.com/laure2carayon – [email protected]
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