Procès Google vs USA : L’œil de Maître Masmi-Dazi – Episode 1
Pendant les prochaines semaines, TheMediaLeader.tech vous propose de suivre le procès de Google pour abus de position dominante aux Etats-Unis. Maître Fayrouze Masmi-Dazi, fondatrice du cabinet d’avocat Dazi, avocate à la cour à Paris et spécialiste des sujets numériques et technologiques, nous propose son analyse chaque mercredi en exclusivité.
A peine Google a-t-il été jugé coupable aux Etats-Unis d’avoir abusé de sa position dominante dans le Search le 5 août dernier, que s’ouvre la phase de plaidoirie très attendue du procès de la publicité en ligne de Google devant la Juge Brinkema en Virginie. Dans les deux cas, c’est le fruit d’une alliance puissante, déterminée et inédite entre le département de la Justice américain et une coalition d’Etats américains qui en est à l’origine.
Google pris en étau des deux côtés de l’Atlantique sur ses activités publicitaires
La justice américaine n’est pas la première, mais probablement l’une des plus déterminées à se soucier de l’abus de pouvoir de marché de Google et à vouloir y remédier efficacement. La Commission européenne qui a rendu plusieurs décisions à l’encontre de Google dont l’une vient d’être définitivement entérinée le 10 septembre dernier par la Cour de Justice de l’Union européenne (Google Shopping), mène une enquête sur le stack publicitaire de Google des deux côtés de la chaîne (buy et sell side).
C’est pourtant l’Autorité française de la concurrence qui – la première – à sanctionné Google dès juin 2021. Les premières actions en dommages et intérêts ont été engagées contre Google, dont une première va donner lieu à une décision du Tribunal de commerce le 21 octobre prochain. D’autres autorités comme l’autorité Britannique sont entrées dans des phases actives. Google se trouve désormais à la croisée de chemins qui semblent de plus en plus converger au moins au niveau transatlantique.
Un dispositif exceptionnel pour un agenda serré
L’ouverture de ce cycle d’audience et de témoignage a été marqué par une déclaration de méfiance de la Juge Brinkema vis-à-vis de la politique interne de destruction de preuves qu’aurait mis en œuvre Google. Fait rare pour un procès fédéral, la Juge a ordonné l’interdiction pour toutes les personnes présentes y compris le New York Times et le Washington Post ou les conseils de Google, d’utiliser des téléphones portables ou ordinateurs, ce qui a déjà occasionné une gestion chaotique d’un malaise cardiaque en pleine audience dès le premier jour.
Mais ce qui caractérise cette juridiction, c’est semble-t-il la rapidité avec laquelle elle prend des décisions. Il n’aura fallu qu’un an pour que l’affaire passe en phase d’audience. Un jugement pourrait intervenir dès l’année prochaine sur la culpabilité de Google. La rapidité n’est semble-t-il pas un vain mot pour ce Tribunal qui revendique sur le frontispice de son immeuble « Justice retardée, Justice déniée ».
Que lui est-il reproché ? Et qu’a-t-il à répondre ?
L’Etat américain reproche à Google d’avoir mené une série d’acquisitions prédatrices qui lui ont permis de construire un monopole à tous les niveaux de la chaîne de valeur du stack publicitaire, et d’avoir altéré le fonctionnement concurrentiel des enchères publicitaires en favorisant ses produits, en les liant entre eux.
Google de son côté maintient le cap en soutenant que le succès n’est pas illégal et que si les produits Google sont puissants, c’est parce qu’ils sont performants. Dans sa première plaidoirie Google a ouvert les hostilités en invoquant que le marché publicitaire est très concurrentiel, Amazon, Tik Tok, Snap, Meta sont autant de concurrents qui empêchent de considérer que Google serait dominant.
Les premiers témoignages (Gannet, Index Echange, Quad, Kevel) confirment en tous cas la prédominance des outils de Google, la difficulté excessive à trouver une alternative. Les avocats de Google insistent eux sur l’existence d’alternatives qui devrait suffire à faire la démonstration de l’absence de dominance de leur client, tout en devant se défendre de mails internes croustillants qui comparent la position de Google à un « Goldman Sachs ou Citibank qui détiendrait la bourse de New York ».
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