Benjamin Grumbach et Franck Farrugia (OMG) : « Face aux aléas, notre mission est de transformer l’incertitude en opportunité »
INTERVIEW DU LUNDI. Moins d’un an après leur arrivée à la tête d’Omnicom Media Group France (OMG), Benjamin Grumbach et Franck Farrugia, misent sur la complémentarité et la synergie pour diriger l’organisation. Dans le rapport New Business de COMvergence pour le premier semestre 2024, qui met en lumière les principaux mouvements de comptes publicitaires et rétentions des agences médias en France, Re-Mind PHD (OMG) et Omnicom Media Group se distinguent en tête des classements. Quelle est donc la feuille de route des deux coprésidents ? Quelle est leur stratégie pour faire entrer OMG dans le top 3 des groupes d’agences médias en France ?
The Media Leader : Pourquoi avoir choisi une coprésidence pour diriger Omnicom Media Group France ?
Benjamin Grumbach : La coprésidence est le prolongement naturel de notre collaboration, qui dure depuis plus de quinze ans, et qui a notamment commencé chez Re-Mind. Ce modèle nous permet d’allier nos forces, d’enrichir nos décisions et d’exécuter plus rapidement les stratégies. À deux, on évite aussi la solitude décisionnelle et les dérives politiques qui peuvent ralentir l’action. Nous partageons une vision commune, mais nos approches différentes enrichissent le débat et permettent d’explorer toutes les options avant de converger vers une solution.
Franck Farrugia : C’est aussi un modèle qui impose une discipline sur la gestion des egos. Aucune décision n’est prise pour des motifs personnels. Nous sommes alignés sur les valeurs de l’entreprise, en plaçant nos clients et nos équipes au centre de toutes nos réflexions. Cela crée un climat de confiance et d’exemplarité managériale qui structure l’ensemble de l’organisation.
TML : Depuis votre arrivée, quels ajustements avez-vous apportés à l’organisation d’OMG France ?
B.G : Notre première priorité a été d’écouter nos équipes et nos clients pour comprendre les forces et les axes d’amélioration de notre organisation. Nous avons procédé à des recrutements stratégiques pour renforcer nos compétences, notamment avec l’arrivée de Fraïza Rabah, Magalie Delmas et Dimitri Aït Kaci. Parallèlement, nous avons valorisé des talents internes. Anne Thétier, par exemple, a évolué dans son environnement et joue désormais un rôle clé dans la représentation de l’agence auprès des instances professionnelles.
F.F : Ces ajustements s’accompagnent d’un travail de fond sur l’optimisation de nos process et de nos structures. Nous avons renforcé nos synergies avec les hubs internationaux du groupe, ce qui nous permet de mieux mobiliser les ressources globales au service de nos clients locaux. Notre objectif est de construire une organisation plus agile, capable de répondre aux exigences croissantes des annonceurs.
Notre première priorité a été d’écouter nos équipes et nos clients
Benjamin Grumbach
TML : Vous parlez de « OMG as a Platform ». Que signifie ce concept et comment se traduit-il dans vos opérations ?
B.G : Nous avons structuré notre organisation autour d’une plateforme unifiée que nous appelons « OMG as a Platform ». Ce modèle repose sur une intégration totale des expertises, sans cloisonnement entre nos départements., nous ne fragmentons pas nos équipes avec des P&L séparés. Chez OMG, toutes les ressources convergent vers un objectif unique : maximiser la satisfaction client.
F.F : Cette approche est soutenue par notre outil, Omni, qui est agnostique et ouvert aux technologies externes. Cela garantit une flexibilité totale pour répondre aux besoins spécifiques de chaque client. Nous avons également structuré nos expertises en verticales, comme Flywheel pour le retail ou Fuse pour le sport et les opérations spéciales. Ces spécialisations nous permettent de proposer des solutions de pointe, adaptées aux enjeux sectoriels de nos annonceurs.
TML : Quel rôle jouent aujourd’hui les marques d’agences dans votre organisation et votre stratégie ?
B.G : Les marques d’agences, comme OMD, Re-Mind PHD ou Hearts & Science, ont un rôle fondamental dans notre organisation. Elles permettent d’offrir des approches différenciées, adaptées aux besoins et aux attentes spécifiques de chaque client. Chaque marque a son identité et son historique, mais elles partagent et bénéficient des ressources de notre plateforme intégrée. Cela garantit qu’un client, quelle que soit la marque avec laquelle il travaille, bénéficie de la même qualité d’expertise et de services.
F.F : Ces marques permettent également de gérer les problématiques de concurrence. En répartissant nos clients entre différentes entités, nous pouvons garantir la confidentialité ainsi qu’une approche dédiée, tout en optimisant les synergies à l’échelle du groupe. Enfin, elles nous permettent de préserver une flexibilité dans notre manière d’opérer : que ce soit pour accompagner un client sur un projet local, régional ou global, chaque marque joue un rôle spécifique dans notre écosystème.
TML : Vous avez remporté récemment le budget monde de Michelin ou localement de l’Assurance Maladie. Comment parvenez-vous à fidéliser vos annonceurs historiques tout en conquérant de nouveaux budgets ?
F.F : Du côté des gains, notre victoire sur Michelin a été une étape marquante. Cette conquête a non seulement renforcé notre hub international basé à Boulogne, mais elle nous a aussi permis d’élargir notre portefeuille de clients internationaux, qui inclut désormais des fleurons comme Air France, Chanel et Michelin. Ces succès témoignent de notre capacité à allier excellence locale et puissance globale.
B.G : Nous avons également remporté récemment le budget de la CNAM (Caisse Nationale d’Assurance Maladie), un gain important qui marque notre retour sur le marché des appels d’offres publics après plus de dix ans d’absence. Ces victoires reflètent notre engagement à diversifier notre portefeuille et à renforcer notre expertise sur des secteurs clés, notamment avec la victoire du groupe Beaumanoir. La fidélisation de nos clients historiques est au cœur de notre stratégie. Nous travaillons depuis 27 ans avec Leclerc, et des marques comme Renault, Volkswagen ou encore Chanel font partie de notre portefeuille stratégique.
Notre victoire sur Michelin a été une étape marquante
Franck Farrugia
TML : L’ambition d’entrer dans le top 3 des agences médias en France est un objectif ambitieux. Comment comptez-vous y parvenir ?
F.F : Notre ambition repose sur trois piliers. Le premier est de continuer à renforcer nos verticales spécialisées pour offrir des solutions toujours plus performantes. Flywheel, par exemple, est un leader mondial du retail media, et nous déployons cette expertise en France avec succès. Le deuxième pilier est la fidélisation de nos talents et l’attraction de nouveaux profils pour rester compétitifs dans un marché où la guerre des compétences est intense. Enfin, nous voulons continuer à innover pour répondre aux attentes croissantes des annonceurs en matière de performance.
B.G : Ce qui nous différencie, c’est notre double posture. Nous sommes challengers sur le marché français, ce qui nous pousse à rester agiles et innovants, mais nous avons aussi la puissance d’un leader international. Cet équilibre nous permet d’avancer de manière méthodique, tout en capitalisant sur les opportunités qui se présentent.
Nous devons également éviter une dépendance excessive aux plateformes internationales, même si leur efficacité est indéniable.
TML : Dans un contexte économique tendu, comment anticipez-vous les évolutions du marché publicitaire ?
B.G : Le contexte économique actuel est marqué par une grande incertitude, avec des annonceurs qui ajustent leurs budgets en fonction de perspectives fluctuantes. Face aux aléas devenus la norme, notre mission est de transformer l’incertitude en opportunité. Cela nous pousse à renforcer notre agilité pour accompagner nos clients dans leurs choix d’investissements. Certains secteurs ralentissent, mais d’autres, comme le retail media ou l’e-commerce, continuent de croître et d’innover.
F.F : Le défi est de combiner une gestion à court terme – pour répondre rapidement à des ajustements budgétaires – et une vision stratégique à moyen terme. Nous nous positionnons comme des partenaires business pour nos clients, en identifiant des leviers de performance dans un environnement où chaque euro investi doit prouver son efficacité.
TML : Dans ce contexte, comment conjuguez-vous performance client et responsabilité sociétale envers les médias ?
B.G : Nous avons une responsabilité envers l’écosystème médiatique. Cela implique d’encourager nos clients auxquels nous promettont une meilleure robustesse, à investir dans des médias locaux et certifiés pour préserver la diversité du paysage médiatique, tout en répondant à leurs exigences de performance.
F.F : Nous devons également éviter une dépendance excessive aux plateformes internationales, même si leur efficacité est indéniable. Il s’agit de trouver un équilibre entre performance et durabilité, en soutenant des initiatives locales et en diversifiant les stratégies d’investissement afin de générer des gains de productivité durables.
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