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Alain Levy (Weborama) : « Open web, cookies et IA : pourquoi l’écosystème publicitaire doit se réinventer »

Alain Levy (Weborama) : « Open web, cookies et IA : pourquoi l’écosystème publicitaire doit se réinventer »
Fondée en 1998, Weborama dirigé par Alain Levy, est l'un des pionniers des adtechs en France.

INTERVIEW TheMediaLeader.tech. Alain Levy, CEO de Weborama, revient sur l’état du marché publicitaire digital à l’aube de 2025. Entre disparition des cookies tiers, montée en puissance de l’intelligence artificielle et difficultés croissantes pour l’open web, il dresse un constat lucide et appelle à une mobilisation collective pour repenser les fondations du secteur.

The Media Leader : Comment percevez-vous l’état du marché du marketing digital en 2024, et quels sont, selon vous, les défis majeurs pour les mois à venir ?

Alain Levy : Nous sommes dans une situation que je n’ai jamais vue en 25 ans de carrière. L’incertitude est totale. Les plateformes elles-mêmes semblent en difficulté et peinent à définir une direction claire. Cela crée un environnement instable pour tous les acteurs : les publishers font face à une menace existentielle, les annonceurs s’adaptent comme ils peuvent, et les ad techs doivent bâtir leurs roadmaps dans un brouillard total, notamment autour de l’avenir des cookies tiers.

En parallèle, l’intelligence artificielle arrive et bouleverse encore plus la donne. Elle promet de révolutionner le search et bien d’autres aspects fondamentaux du marketing digital, mais cela ajoute un niveau de complexité supplémentaire.

TML : Google alterne entre annonces et revirements sur les cookies tiers. Devons-nous définitivement tourner la page ?

L’open web est clairement en danger. Il souffre d’un manque de stabilité et de direction claire.

A.L. : La réponse courte est oui. Le marché a déjà amorcé sa transition : entre l’augmentation des bloqueurs, les règles de consentement et les annonces de Google, nous sommes passés sous le seuil des 40 % d’impressions publicitaires disposant d’un cookie tiers.

Cela force l’écosystème à s’organiser autrement, mais la réalité est difficile. Les attentes des annonceurs restent les mêmes en matière de performance et de mesure, alors que les outils pour y répondre ne sont plus les mêmes. Le défi est immense.

TML : L’intelligence artificielle peut-elle être la solution pour un monde sans cookies tiers ?

A.L. : Absolument. Chez Weborama, nous travaillons depuis plus de dix ans sur l’IA contextuelle et sémantique, qui permet de comprendre en profondeur les contenus et de les qualifier de manière fine et instantanée. Aujourd’hui, grâce à des technologies comme les embeddings, nous obtenons des résultats souvent équivalents, voire supérieurs, à ceux des cookies tiers, y compris en termes de performance.

En parallèle, l’IA générative ouvre des perspectives intéressantes, notamment pour automatiser et simplifier la gestion des campagnes. Nous avons d’ailleurs intégré cette technologie dans notre outil WebOmind, qui permet de gérer des campagnes contextuelles de bout en bout.

TML : L’open web peut-il survivre face à la domination des plateformes et à la disparition des cookies tiers ?

A.L. : L’open web est clairement en danger. Il souffre d’un manque de stabilité et de direction claire. Contrairement aux walled gardens, où les règles sont définies, l’open web doit composer avec une myriade d’acteurs et une législation complexe.

La disparition des cookies tiers a particulièrement affecté cet écosystème, privant les publishers de revenus stables. Les solutions alternatives, comme les identifiants universels ou la Privacy Sandbox de Google, restent incertaines et fragmentées. L’équation économique de l’open web est donc extrêmement complexe, et les publishers ont de plus en plus de mal à vivre de leur contenu.

Séparer Google de ses outils publicitaires ne changerait pas grand-chose.

TML : Pensez-vous que le démantèlement de Google soit possible ou souhaitable ?

A.L. : C’est inévitable à terme, car le marché est devenu trop petit pour ces géants. Cependant, tout dépendra de la manière dont cela sera fait. Séparer Google de ses outils publicitaires ne changerait pas grand-chose. En revanche, si Google devait se séparer de Chrome, cela aurait un impact majeur.

Cela dit, nous devons aussi nous rappeler que ces entreprises sont déjà tournées vers l’avenir, notamment avec l’intelligence artificielle. Démanteler Google pourrait bien arriver trop tard pour changer réellement les règles du jeu.

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