Audiovisuel public : le Sénat verrouille le financement, la réforme de la gouvernance en suspens
Le Sénat a adopté ce mercredi une proposition de loi visant à pérenniser le financement de l’audiovisuel public par l’affectation d’une part de TVA. Cette mesure, soutenue par la ministre de la Culture, Rachida Dati, vient en réponse à l’urgence de trouver une solution durable avant la fin de l’année 2024, date de l’expiration du système provisoire mis en place après la suppression de la redevance audiovisuelle en 2022.
Un financement sanctuarisé pour l’audiovisuel public
« Pour garantir un audiovisuel public fort, il faut un financement fort, sanctuarisé », a déclaré Rachida Dati devant les sénateurs, appuyant la proposition de loi organique portée par le sénateur Les Républicains Cédric Vial, adoptée à une quasi-unanimité. Le texte prévoit de financer l’audiovisuel public grâce à une partie de la TVA, permettant d’éviter le scénario redouté d’une « budgétisation » qui verrait le financement passer sous contrôle direct de l’État.
Cédric Vial a ainsi alerté sur ce risque : « En cas de budgétisation, le gouvernement prend le pouvoir, comme sur n’importe quelle autre politique publique, d’intervenir sur les montants affectés en cours d’année. »
Protégés des aléas économiques
Pour éviter cela, le gouvernement a rejoint la position des sénateurs en proposant l’affectation annuelle d’un « montant d’impôt d’État » provenant de la TVA, défini lors des débats budgétaires à l’automne. « Les entreprises connaîtront dès le vote de la loi de finances le montant en euros qui leur sera reversé pour l’année. Elles seront ainsi protégées des aléas de la conjoncture économique », a précisé Rachida Dati.
Ce mécanisme, alignant également Arte sur le même modèle de financement, est préféré à l’idée d’une « fraction » de TVA ou d’un prélèvement sur recettes. Il permet « d’assurer à court terme un financement pérenne et lisible », a ajouté le rapporteur Jean-Raymond Hugonet.
Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde, a salué cette décision : « Le fait d’avoir une recette affectée qui ne soit pas le budget de l’État, c’est un signe objectif d’indépendance indiscutable. C’est important d’avoir le soutien des élus. »
La gouvernance au centre des débats
Si le texte a obtenu un large soutien, certains sénateurs de gauche ont exprimé des réserves, le jugeant comme une « méthode de repli » et « injuste sur le plan fiscal », selon Thomas Dossus, sénateur écologiste. Les discussions se sont ensuite élargies à la question de la gouvernance de l’audiovisuel public, un sujet sensible avec le projet de fusion entre France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Ina, mis en pause depuis la dissolution de l’Assemblée nationale.
« Il faut bien sûr se battre sur le financement, mais face à la concurrence croissante, notre audiovisuel public doit aussi se réorganiser s’il ne veut pas s’affaiblir », a prévenu Rachida Dati. Laurent Lafon, président de la commission Culture du Sénat, a quant à lui appelé à la création d’une holding pour regrouper l’audiovisuel public, mettant en garde contre les risques pour ce secteur face aux plateformes numériques.
La réforme de la gouvernance reste en suspens, mais la ministre a promis « d’avancer sur ces discussions » sans pour autant fixer de calendrier.
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