Bertrand Beaudichon dévoile son projet pour Mediabrands en France

INTERVIEW DU LUNDI. Après l’annonce de la réorganisation du management et la réduction d’effectifs chez IPG Mediabrands France, Bertrand Beaudichon, nouveau CEO, détaille sa feuille de route. Dans cet entretien à The Media Leader, il dévoile les mesures mises en place pour accompagner les collaborateurs, la stratégie de conquête de nouveaux clients et les priorités de l’agence face aux bouleversements du marché. Confiant et serein, celui qui est à la tête d’Initiative depuis 2018, nous explique comment Mediabrands entend maintenir son cap malgré les turbulences.

The Media Leader : Vous prenez la direction générale d’IPG Mediabrands en France, suite au départ de Thomas Jamet, et les récentes annonces de réorganisation. Comment abordez-vous cette nouvelle étape pour l’agence ?

Bertrand Beaudichon : Je suis extrêmement serein. Nous avons traversé des moments difficiles, mais ce sont des défis que nous sommes prêts à relever. Perdre des clients majeurs, comme Amazon ou Lego, fait partie de la vie d’une agence. Cela nous oblige à revoir notre organisation, mais nous avons l’expérience et la résilience nécessaires pour faire face à ces bouleversements. Nous avons lancé un plan de départs volontaires, et non un plan social, ce qui est important à souligner. Nous souhaitons nous réorganiser tout en respectant les projets personnels de nos collaborateurs, notamment ceux qui souhaitent prendre un nouveau tournant dans leur carrière. Ce plan, actuellement en discussion avec le CSE, concernera environ 10 % de nos effectifs, soit une vingtaine de personnes sur nos 200 employés.

The Media Leader : Ce plan de départs concerne-t-il uniquement les personnes travaillant sur les comptes perdus ?

B.B : Principalement, oui, mais pas uniquement. Nous adoptons une approche plus large pour permettre à ceux qui souhaitent partir de le faire. Beaucoup de collaborateurs ont des aspirations à faire autre chose ou à se réorienter, et nous avons décidé d’accompagner ces choix. C’est pour cette raison que nous avons choisi de passer par un plan volontaire plutôt que contraint. De plus, nous nous engageons à redistribuer les meilleurs talents sur les autres comptes, car nous avons toujours une très belle dynamique avec de nouveaux clients qui arrivent.

The Media Leader : L’usage veut que certains collaborateurs suivent le compte dans la nouvelle agence…

B.B : Concernant Amazon qui passe chez GroupM (WPP), il y a assez peu de besoins. J’ai eu l’occasion d’en parler à Alexandra Chabanne (CEO de GroupM France, NDLR). L’équipe, qui va être mobilisée sur le compte à Paris, semble être beaucoup plus réduite que celle qu’on avait en France. C’est d’ailleurs un signe des temps du mouvement de rationalisation et de centralisation qui est en train d’avoir lieu chez les grands annonceurs internationaux. Mediabrands conserve la stratégie média d’Amazon Ads, Amazon Web Services et Amazon Business.

Nous agissons comme une agence indépendante tout en bénéficiant de la force d’un réseau international.

The Media Leader : En effet, malgré la perte d’Amazon, vous avez remporté des contrats importants, comme Vinted en début d’année ou Elanco, un spécialiste de la santé vétérinaire, annoncé la semaine dernière. Est-ce que cela compense ces pertes ?

Bertrand Beaudichon : Nous avons anticipé la possibilité de perdre de gros comptes et avons travaillé ces deux dernières années à diversifier notre portefeuille. Cela porte aujourd’hui ses fruits, car nous avons un pipeline d’appels d’offres extrêmement actif. Nous venons de remporter Vinted en France et Elanco, ainsi que plusieurs autres appels d’offres sur le point d’aboutir. Cette dynamique nous permet non seulement de maintenir une partie des équipes, mais également de continuer à croître. Nous sommes résolument tournés vers l’avenir et prêts à rebondir rapidement.

The Media Leader : Vous mentionnez souvent la proximité et l’agilité de Mediabrands. En quoi cela fait-il la différence dans un marché aussi compétitif ?

Bertrand Beaudichon : Nous avons la chance d’être l’une des plus petites agences des « Big Six » en France, avec environ 200 collaborateurs en France. Cela nous permet d’être extrêmement agiles et proches de nos clients. Nous agissons comme une agence indépendante tout en bénéficiant de la force d’un réseau international. Cette taille humaine nous permet d’offrir un service très personnalisé à nos clients, ce qui est de plus en plus recherché, surtout dans un contexte de forte inflation des médias traditionnels où la pertinence devient primordiale.

Nous allons mutualiser le planning stratégique, qui a été un des piliers de notre succès ces dernières années.

The Media Leader : Vous avez également parlé d’une nouvelle organisation au sein de Mediabrands. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Bertrand Beaudichon : Nous allons renforcer notre structure pour mieux répondre aux besoins de nos clients. Tout d’abord, nous créons une équipe de new business et de marketing qui sera commune à nos deux agences, Initiative et UM. Cela nous permettra d’optimiser nos efforts de conquête tout en offrant une stratégie plus cohérente. Ensuite, nous allons mutualiser le planning stratégique, qui a été un des piliers de notre succès ces dernières années. Le but est de continuer à offrir un conseil stratégique de haut niveau à nos clients et de les aider à se différencier dans un environnement médiatique en pleine transformation.

The Media Leader : Comment allez-vous positionner UM dont la direction est confiée à Emilie Thorel ? Allez-vous lancer une nouvelle agence en France comme MediaHub, l’un des réseaux du groupe ?

Bertrand Beaudichon : Le nouveau positionnement de UM est effectivement l’une de nos priorités. Nous allons révéler ce repositionnement dans les prochaines semaines, avec une approche très différenciante, notamment sur l’axe de la performance et du conseil stratégique. UM souhaite se concentrer davantage sur la data et l’innovation, en accompagnant les annonceurs dans leur transformation numérique avec une approche plus tournée vers la mesure de l’efficacité et des résultats concrets. C’est un positionnement très complémentaire à celui d’Initiative qui est davantage orienté vers la créativité et le marketing stratégique avec sa « Culture of Velocity ». Quant à MediaHub, nous en discutons. C’est une possibilité, mais ce n’est pas notre priorité à court terme. Pour le moment, notre focus est de consolider et de renforcer nos deux marques existantes, UM et Initiative, avant d’envisager l’introduction d’un troisième réseau.

The Media Leader : Quelles sont vos priorités pour l’année à venir ? Y a-t-il des secteurs que vous ciblez particulièrement ?

Bertrand Beaudichon : Notre priorité est de renforcer notre présence dans le retail et le luxe, deux secteurs en pleine évolution. Nous avons aussi un axe de développement fort sur les clients locaux avec des ambitions internationales, comme nous le faisons déjà pour des marques comme Patek Philippe ou Dyson. Nous avons également une vraie expertise autour des cryptos, avec un compte comme Ledger géré depuis Paris.

The Media Leader : Comment gérez-vous l’impact médiatique de la réorganisation d’IPG Mediabrands France et le départ de Thomas Jamet ?

Bertrand Beaudichon : Le départ de Thomas a été un choc pour beaucoup, mais il a été respecté en interne, car il s’agissait de sa décision personnelle après dix ans à la tête de Mediabrands. L’annonce de la réorganisation a généré des réactions, mais nous avons veillé à maintenir la transparence et à rassurer nos équipes et nos clients. Notre priorité est de continuer d’avancer, avec un plan clair et des ambitions fortes pour l’avenir. Nous sommes confiants dans notre capacité à relever ces défis et à poursuivre notre croissance.