Ce que l’arrivée de Prime Video va changer sur le marché publicitaire du streaming
Après Netflix et Disney+, c’est une autre plateforme américaine qui rentre à pieds joints sur le marché publicitaire français. Depuis ce mardi 9 avril, les 12 millions d’abonnés français à Amazon Prime, dont 9 millions actifs sur la plateforme Prime Video, sont exposés à la publicité. Si les annonceurs s’enthousiasment de ce lancement, les agences médias se questionnent sur l’arrivée d’un nouvel acteur qui fragmente un marché de plus en plus complexe.
La firme de Jeff Bezos a fait un choix complètement inverse que ses concurrents Netflix et Disney+. Si les deux services de streaming payant ont décidé de créer une nouvelle offre avec publicité à 6€ par mois, Amazon inclut l’ensemble de son parc d’abonnés dans la formule avec publicité. Il faut payer désormais 2€, en plus de l’abonnement Prime à 7€ (soit 9€) pour être exempté de réclame. « L’idée est de proposer dès le premier jour une audience large avec beaucoup de possibilités de ciblage » a expliqué Nicolas Schmitz, head of agency development chez Amazon Ads à l’occasion du Total Video Forum organisé ce mardi au Grand Rex par The Media Leader. Une offre qui semble enthousiasmer le marché publicitaire.
Retours d’expériences
« Amazon promet de la puissance, de la data transactionnelle et un dispositif de mesure business, que l’on soit annonceur endémique ou pas » se félicite Souaade Agmir, directrice du trading digital chez Publicis Media. « L’activation de la data shoppers sur l’inventaire CTV d’Amazon est intéressante. L’activation et la mesure de la performance business des campagnes vidéo, notamment grâce à AMC, est très prometteur, il faudra voir quels seront les résultats concrets ». Si Amazon promet 9 millions d’abonnés sur l’offre en France, les premières campagnes seront scrutées avec attention par les annonceurs pionniers.
« Cela pourra nous donner une idée de l’audience réellement effective, car tous les abonnés de Prime ne sont pas systématiquement sur l’offre Prime Video et viennent au départ surtout pour la livraison gratuite. » tempère Souaade Agmir.
Amazon bénéficie néanmoins des expériences lancées en 2022 et 2023 par ses concurrents comme Netflix et Disney+ dont on a critiqué le reach réel. Selon nos informations, Netflix aurait entre 1 et 1,2 million de profils actifs exposés à la publicité en France, entre 600 000 et 800 000 profils pour Disney+… Une goutte d’eau par rapport à YouTube, TF1+, France.tv ou 6Play.
De nouvelles expériences publicitaires
Les experts saluent la désirabilité de ces offres sur le marché. « Ils ont amené de nouvelles alternatives avec des expériences publicitaires premium, brand safe et des contenus de qualité. Il y a encore un fort potentiel de développement pour ces offres, de gagner encore plus en audience, et par ce biais de démocratiser davantage les coûts. La visibilité apportée sur les prochaines étapes de déploiement, notamment sur les options de ciblage et l’intégration sur mesure dans les contenus, est intéressante » ajoute Souaade Agmir.
Fort de ces contextes premium, ces plateformes pratiquent des tarifs de 25 à 35€ du CPM (coût pour mille), quand YouTube affiche entre 5 et 10€ et les plateformes BVOD, TF1+, 6Play, france.tv, entre 15 et 25€. Netflix avait d’ailleurs fait sensation en annonçant des CPM autour de 50€ à son lancement avant de revoir ses ardeurs, à la baisse.
Amazon a adopté une formule qui se démarque pour attirer les annonceurs en proposant un bonus de lancement de 50%, ce qui fait passer de 20 à 25€ en fonction du ciblage… à environ 15€ du CPM… Une sorte de PrimeDay pour les annonceurs qui pourrait donner de mauvaises habitudes… « Les écarts sont significatifs mais toutes les offres ne sont pas comparables au même niveau, que ce soit sur l’expérience publicitaire, le type de contenus, de data et la puissance des audiences » rappelle Souaade Agmir qui regrette néanmoins les difficultés d’accès aux inventaires publicitaires. En effet, Amazon ne permet l’achat qu’uniquement via son DSP AAP, tout comme Netflix avec Microsoft/XandR et YouTube avec DV360. « C’est une usine à gaz opérationnelle et c’est contreproductif, cela va à l’encontre des bénéfices qu’offre l’adressabilité et qui permet de dédupliquer les audiences et d’optimiser le reach. Ce marché doit être plus ouvert sur l’accessibilité des inventaires afin de bénéficier pleinement de tout son potentiel de croissance ». Disney+, bon élève, a adopté une stratégie plus ouverte, tout comme les plateformes de BVOD comme TF1+.
Un nouveau sur le marché avant l’été
Parmi les grands annonceurs présents sur Prime Video à son lancement, L’Oréal estime que « de par son lancement sur l’ensemble de ces abonnés, Prime Video se présente comme la plateforme la plus puissante de la SVOD et vient poursuivre notre diversification du mix média vidéo. Nous sommes également un annonceur présent sur la plateforme de retail Amazon, par conséquent nous souhaitons à travers nos prises de paroles en vidéo sur Prime développer notre stratégie full-funnel et data sur ce partenaire ». Les abonnés Prime Video verront les publicités de Lancôme, Kiehl’s et Garnier dans les prochaines semaines.
En tout cas, pour ceux qui voudraient une pause dans la fragmentation de l’offre en France, le marché vidéo ne connaitra pas de répit d’ici l’été. Outre le lancement de M6+, l’américain Warner Bros Discovery lancera sa plateforme Max avant les JO de Paris 2024. Avec une option payante Sports incluant Eurosport, le service proposera une diffusion intégrale de l’événement du siècle. « Quand on voit l’engouement autour des packs publicitaires des JO, on peut dire que cela devrait être un lancement bien orchestré. Il faudra néanmoins transformer le coup d’essai au-delà des JO dans un contexte très compétitif et avec des acteurs bien installés » conclut Souaade Agmir.
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