David Larramendy (M6 Publicité) : « Nous détaillerons prochainement nos actions autour du streaming »
INTERVIEW DU LUNDI. Le média TV est au cœur de tous les questionnements face à sa lente érosion. Alors que Médiamétrie porte le projet d’une mesure Total Vidéo en 2024, les grandes chaînes se lancent corps et âmes dans la transversalité et le totem du streaming. Comment se place le groupe M6 et sa régie au cœur de ce marché mouvementé ? Comment le groupe veut-il se faire une place entre TF1+, YouTube et Netflix ? David Larramendy, DG de M6 Publicité, est l’invité de la rédaction.
The Media Leader : Quel bilan faites-vous de 2023 et quelle est votre feuille de route pour 2024 ?
David Larramendy : Nous publierons nos chiffres 2023 dans une quinzaine de jours, mais nous pouvons d’ores et déjà dire que l’année s’est plutôt bien passée d’un point de vue publicitaire. La télévision continue de séduire les annonceurs avec ses forces spécifiques : une large couverture, la qualité de ses contenus et un coût très accessible. Le marché de la radio est attendu en hausse pour 2023 avec notamment le retour en force du secteur automobile. Nos médias digitaux se sont aussi bien comportés avec une forte hausse de la demande tant pour la vidéo que pour l’audio.
Du point de vue des contenus, nous continuons d’avoir une offre puissante en TV linéaire avec 23 millions de Français présents chaque jour sur nos antennes et une PDA moyenne sur la cible commerciale de 20,5% en hausse de 0,2 point par rapport à 2022. Nous sommes heureux de nos audiences en prime de nos grandes marques qui sont proches de leurs plus hauts historiques. C’est le cas, par exemple, pour l’Amour est dans le Pré, saison 18, qui a conquis 4,3 millions de téléspectateurs en moyenne. Nous avons continué d’innover avec la confirmation du lancement des Traitres qui a connu une forte croissance lors de sa deuxième saison avec 32% de part d’audience sur la cible commerciale, soit une croissance de +2 points (2,5M°). Les audiences de 6play ont connu une forte accélération, notamment au 2d semestre et certaines de nos grandes émissions atteignent désormais des audiences de près de 40% en digital (c’est le cas de Pékin Express par exemple). Notre pôle radio conserve sa position de leader des groupes privés avec 17,6% de part d’audience porté par RTL, écoutée chaque jour par 5,4 millions d’auditeurs. Nous continuons enfin de faire la course en tête sur les réseaux sociaux ou nous sommes la première marque média : 8,5 milliards de vidéos vues en 2023 et plus de 65 millions d’abonnés au total sur les plateformes.
Nous espérons que 2024 sera un bon cru, porté notamment par une actualité sportive riche avec les JO de Paris cet été et l’Euro que nous co-diffuserons entre juin et juillet, notamment avec la finale sur M6 comme en 2016 et 2021. L’année qui vient sera également l’occasion pour nous d’investir massivement dans nos supports digitaux pour accompagner l’évolution rapide des usages.
Le marché de la radio est attendu en hausse pour 2023 avec notamment le retour en force du secteur automobile
David Larramendy, directeur général de M6 Publicité
The Media Leader : En 2023, les Français ont consommé 4h37 de vidéo chaque jour, selon « L’Année TV 2023 : La TV, plateforme des plateformes » de Médiamétrie. La vidéo à la demande occupe de plus en plus de place dans les habitudes de consommation des Français. Comment analysez-vous ces chiffres ? Comment envisagez-vous l’avenir de la TV linéaire ?
D.L : La vidéo (comme l’audio d’ailleurs) n’ont jamais autant été consommés par les Français. On ne peut que s’en réjouir ! La consommation à la demande est en plein essor, c’est une évidence, et cela va continuer dans le futur. Dans le même temps, nous pensons que la télévision linéaire (qui représente 2/3 de la consommation vidéo des Français en 2023) continuera d’être au cœur de cet écosystème vidéo dans les prochaines années. L’avenir de la télévision repose ainsi sur ses deux jambes : le linéaire et le streaming, et l’un et l’autre se nourrissant mutuellement comme le montre le succès digital de nos grandes marques.
The Media Leader : TF1+ a lancé sa nouvelle plateforme avec la volonté de concurrencer YouTube ou Netflix sur le marché publicitaire, et faire progresser le CPM. Quelle est l’ambition de 6Play face à ces mouvements du marché ?
D.L : Vous le savez, nous avons été les pionniers de la télévision digitale : les premiers à lancer un système de replay en 2008. Les premiers également à lancer la publicité data via le login obligatoire lors de la création de Smart6tem en 2015. Nous aurons l’occasion très prochainement de détailler nos actions dans ce domaine pour 2024.
The Media Leader : Comment accueillez-vous la nouvelle mesure TV de Médiamétrie et son ambition d’une mesure Total Video en fin d’année ? Le débat est en cours entre les organisations professionnelles entre CPM/GRP. Quelle est votre vision ? Comment l’arrivée d’une monnaie commune entre le linéaire et le digital, pourrait affecter les offres publicitaires de M6 Publicité ?
D.L : Avec les nouveaux usages, il est logique que la mesure TV continue d’évoluer comme c’est le cas depuis le 1er janvier de cette année. Comme les annonceurs et les agences, nous sommes aux côtés de Médiamétrie dans cette transformation. L’évolution de la mesure ne doit néanmoins pas se faire dans n’importe quelles conditions : pour servir au mieux le marché, elle doit respecter des standards rigoureux, similaires à ceux de la mesure TV traditionnelle, et ne pas entraîner l’ensemble du marché vers le bas. Ceci nécessite la collaboration entre tous les acteurs du marché. Notre objectif est de parvenir à une mesure fiable et unanimement reconnue. Quant au choix entre GRP et CPM pour le marché vidéo, cette décision reste secondaire pour l’instant et sera abordée ultérieurement. En fin de compte, construire une mesure d’audience solide, c’est comme bâtir une maison : en pierre ou en bois, ce qui compte d’abord c’est la solidité des fondations et la précision du plan.
The Media Leader : La TV segmentée a vu son envol en 2023. Quelle est l’ambition pour 2024 sachant que Free manque toujours à l’appel, malgré quelques effets d’annonces… ?
D.L : Nous avons été les premiers à annoncer un accord avec l’ensemble des opérateurs sur la TV segmentée et les premières campagnes Free seront live sur nos chaînes d’ici quelques semaines. C’est désormais un tiers de la population Française qui est couverte. La TV segmentée permet d’attirer de nouveaux annonceurs, notamment locaux, mais elle est également utilisée par des annonceurs historiques pour améliorer la couverture de leur campagne en ciblant par exemple les petits et moyens consommateurs TV. Près de 200 cibles sont disponibles en TVS dont plus de 40% sont sorties en 2023. Les revenus de la TVS ont augmenté de 90% en 2023 par rapport à 2022 et 2024 devrait à nouveau être une année de forte croissance. Nous allons continuer à travailler main dans la main avec les opérateurs pour continuer d’améliorer la couverture ainsi que la data disponible. Nous serons au rendez-vous en 2024 pour soutenir la croissance d’un produit qui allie la puissance et la qualité unique de la TV à la flexibilité et à la précision du digital.
Le retail media est un levier porteur qui séduit les annonceurs
David Larramendy
The Media Leader : Quel bilan faites-vous de votre partenariat avec Unlimitail sur la data retail. Allez-vous l’étendre à d’autres acteurs ?
D.L : Le retail media est un levier porteur qui séduit les annonceurs. Nous avons pris les devants en établissant un partenariat stratégique avec Unlimitail dès le premier semestre 2023. Nous sommes aussi fiers d’être le premier groupe TV à avoir intégré la data shopper à l’offre de télévision segmentée.
Déjà plus de 50 de campagnes data ciblant les encartés Carrefour ont été diffusées, et les retours sont très positifs avec un niveau élevé d’annonceurs convaincus et qui reviennent. Nous annoncerons en 2024 de nouveaux partenariats stratégiques pour enrichir notre offre. Nous sommes d’ailleurs persuadés qu’une approche collaborative avec l’ensemble des distributeurs est essentielle pour que les annonceurs puissent profiter d’une couverture maximale pour tirer parti de la précision de ciblage offerte par la data retail.
The Media Leader : Comment analysez-vous les derniers résultats d’audiences de vos radios ?
D.L : En 2023, le pôle radio du groupe conserve sa position de leader des groupes privés avec 17,6 % de part d’audience. RTL, écoutée quotidiennement par près de 5,4 millions d’auditeurs maintient son statut de 1ʳᵉ radio privée de France avec une part d’audience de 12,2% en avance de +5,8 pts sur son 1ᵉʳ concurrent privé. Ce score s’inscrit dans un contexte particulier, puisqu’en arrêtant les grandes ondes au 1ᵉʳ janvier 2023 dans le cadre de son plan de sobriété énergétique, RTL a réduit sa couverture du territoire métropolitain. Ces résultats pour le linéaire sont soutenus par l’offre digitale qui poursuit son développement avec succès avec plus de 55M de sessions d’écoute sur nos stations en décembre 2023, et RTL qui conserve sa place de 1er éditeur de podcasts privé porté notamment par les Grosses Têtes, 1er podcast de France. En 2024, le lancement de nouvelles webradios et l’élargissement de la proposition de podcasts autour des thématiques de l’humour, l’histoire, le crime, la santé et la culture générale offriront de nouveaux succès d’audiences à nos radios.
L’expérience publicitaire est également au cœur de l’enjeu des audiences radio : pour 2024, M6 Publicité s’engage à proposer un « new deal audio » sur les antennes du groupe, avec l’objectif à horizon 2 ans de ne pas dépasser la durée publicitaire de 20% du temps d’antenne, soit 12 minutes par heure, décrochage local compris. Un nouveau contrat d’écoute doublement vertueux, à la fois pour les auditeurs et pour les marques qui verront leur émergence et l’efficacité de leurs campagnes renforcée.
The Media Leader : Comment se présente l’année sportive du Groupe M6 sans les JO ? Quand publierez-vous vos offres commerciales pour l’Euro ?
D.L : Sur le plan sportif, l’année 2024 s’annonce très riche avec dès le 11 février la finale du Super Bowl sur M6. Nous aurons ensuite la phase finale de la Ligue Europa avec 4 clubs français encore en lice. Et enfin le grand rendez-vous de l’année avec l’Euro qui débute le 14 juin et pour lequel M6 diffusera en direct et en clair 13 des plus belles affiches de la compétition dont la finale. Nous publierons cette semaine nos offres commerciales pour l’Euro autour d’un dispositif inédit par sa puissance qui illustre la complémentarité de nos antennes vidéo et audio, linéaire et délinaire.
The Media Leader : Le SRI va lancer le SDAT (Sustainable Digital Ad Trust). Allez-vous y souscrire ? Quelles sont les prochaines étapes de vos actions en matière de calcul de l’impact environnemental des campagnes ?
D.L : Nous allons effectivement souscrire au SDAT, programme visant à définir les contours d’une publicité digitale responsable. Nous continuerons également à travailler à l’optimisation de l’impact carbone de notre chaine de valeur sur le digital. En 2023, la première étape a consisté à cartographier les différentes catégories d’impacts carbone pour déterminer les leviers d’impacts les plus forts et délimiter un périmètre « activable » sur lequel nous pouvons agir. Les deux principaux leviers activables sont la compression vidéo grâce à la technologie de notre partenaire Bedrock (jusqu’à 97% de réduction) et le mode Eco-stream sur 6play qui permet aux utilisateurs d’optimiser l’impact de leur consommation vidéo. En 2024, nous franchirons une étape supplémentaire en permettant aux annonceurs de construire leur media planning sur 6play en se basant sur des critères spécifiques pour minimiser l’empreinte carbone de leurs campagnes.
Nous continuons en parallèle à travailler activement au sein du SNPTV et du BDR sur les questions carbone. Le SNPTV sortira prochainement la V2 de son référentiel carbone intégrant le cycle de vie des réseaux TNT et satellite. Le référentiel carbone du BDR vient quant à lui d’intégrer le méta-référentiel de l’UDM (comme celui du SNPTV) et le BDR travaille à la réduction de l’impact carbone des publicités en audio digital via le levier des spécificités techniques. Nous souhaitons favoriser l’adoption de ces référentiels par les agences et annonceurs dans leurs outils.
Rappelons enfin que les régies françaises sont précurseures et ont été pilotes à l’échelle internationale sur ces sujets. Nous sommes en discussion avec le GARM (Global Alliance For Responsible Media) pour obtenir un référentiel carbone commun à l’avenir.
The Media Leader : Votre dispositif autour de l’inclusion publicitaire (sous-titrage…) a-t-il vocation à perdurer ? Les annonceurs sont-ils friands de cette évolution ? Quelles sont vos autres initiatives RSE ?
D.L : Oui, notre initiative autour de l’inclusion dans la publicité, notamment par le sous-titrage pour les sourds et malentendants, est pérenne. Seulement 10% des publicités diffusées en télévision linéaire sont sous-titrées pour les personnes sourdes ou malentendantes (SME), alors qu’en France 5 à 7 millions de personnes souffrent de surdité. Face à ce constat, nous avons proposé une solution pour sensibiliser et encourager l’intégration du sous-titrage SME dans les spots publicitaires d’annonceurs ne l’ayant jamais mis en place : nous leur offrons ce 1er sous-titrage SME. Une dizaine d’annonceurs a déjà répondu à l’appel et nous continuerons à proposer ce service tout au long de l’année 2024. Nous réfléchissons également à l’élargir à l’audiodescription.
Nos annonceurs ont également été sensibles à notre offre « Comportements Responsables » visant à amplifier les messages de leurs messages en faveur de l’adoption de comportements de consommation plus respectueux : EDF, Nespresso et Refashion l’ont par exemple déjà activé pour promouvoir, respectivement, la sobriété énergétique, les biodéchets et la seconde main. Nous travaillons aussi côté antenne pour améliorer le bilan carbone de nos émissions : en 2023, Top Chef est devenue la 1ʳᵉ émission de divertissement labelisée Ecoprod.
Je suis heureux enfin d’annoncer que nous lançons la 2ᵉ édition de notre Hackathon engagé. Accompagnées de salariés de la régie et de professionnels de la communication (notamment grâce à la participation de 4 agences partenaires), cinq associations présélectionnées relèvent le challenge de créer en 24h le story-board de leur 1er spot publicitaire que nous produirons et diffuserons sur nos antennes. C’est un moment particulièrement stimulant et enrichissant pour tous ceux qui y participent, les membres des associations comme les professionnels qui les aident.
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