La conférence luxe de Clés vue par Reload
"C’est sous les ors du Meurice que Perla Servan-Schreiber présentait mercredi 5 décembre le supplément spécial luxe de Clés intitulé Slow Luxury, disponible en anglais et en chinois et diffusé aux Galeries Lafayette.
C’était également l’occasion d’aborder les enjeux de cette industrie très particulière avec un plateau de «speakers» cinq étoiles : Vincent Bastien (homme de luxe depuis 25 ans et professeur à HEC), Olivia Gazalé (philosophe et maître de conférence à Sciences Po), Anne Dellière (directrice marketing du groupe Richemont), Natacha Dzikowski (fondatrice et directrice générale de l’agence TBWALuxury Arts) ainsi que Christian Blanckaert (homme d’affaire et ancien DG d’Hermès).
La table ronde s’est déroulée sans aucun support Powerpoint, écran géant ou commentaires en direct sur les réseaux sociaux. Les accros à Twitter n’auraient de toute façon pu accéder à leur timeline car les téléphones captent difficilement dans les salons feutrés des palaces parisiens… Et c’est tant mieux car ici, la débauche n’est pas technologique mais bien intellectuelle, comme en témoignent les innombrables penseurs invoqués par les intervenants : Durkheim, Marx, Weber, Maslow, Rousseau ou encore Girard !
Il faut dire que la question centrale du débat exigeait de l’esprit : en ces temps de crise, le luxe est-il une folie ? Réponse de Vincent Bastien : le luxe revêt deux fonctions distinctes. Une fonction pour soi, celle de l'incarnation et de la réalisation des désirs, et une fonction pour les autres, comme marqueur social. Deux besoins qui le rendraient essentiel, et d'autant plus en ces temps d'incertitude ! Et Olivia Gazalé d'achever de rassurer un auditoire composé de représentants de grandes maisons : c'est surtout le luxe pour soi qui se développe aujourd'hui, comme résistance au climat morose. Au-delà, si les philosophes condamnent souvent l'opulence et la vanité, le luxe doit plutôt être vu comme un élément de différenciation entre l'homme et l'animal, et l'incarnation du génie humain, capable de prouesses technologiques pour leur simple beauté. Anne Dellière parle même de «fous consentants» pour décrire les passionnés qui peuvent passer jusqu'à un an et demi à monter une même montre !
Mais s’il y a un secteur qui n’a pas les mêmes rythmes de production, c’est la parfumerie ! Natacha Dzikowski évoque ainsi les centaines de nouvelles fragrances lancées chaque année. Cette profusion de senteurs et de marques, n'est-ce pas l'antithèse de l'exception ? Réponse de la publicitaire derrière les campagnes de «Dior J'adore» et «Yves Saint Laurent Manifesto» : oui, mais les mauvais produits disparaissent aussi vite qu'ils sont apparus, ne laissant place qu'au véritable luxe.
Derrière ce paradoxe, une question plus épineuse : le luxe est-il soluble dans l'industrie ? Pour Vincent Bastien, qui a dirigé aussi bien Saint Gobain que Louis Vuitton, les deux sont parfaitement compatibles. Un avis partagé par Christian Blanckaert, qui précise cependant que les maisons sont comme une grande famille : à la fois solidaire et parcourue de tensions extrêmes… Un monde à part !"
Yves Siméon, fondateur de Reload pour 100%media
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