|

La contagion E (et M) commerce en Chine, par Laure de Carayon, Founder/CEO, China Connect

La contagion E (et M) commerce en Chine, par Laure de Carayon, Founder/CEO, China Connect

2000 : un peu plus de 2M d’internautes chinois. 1er semestre 2014 : ils sont 640Millions, +400Millions à acheter en ligne et le taux de pénétration d’internet est inférieur à 50%… la Chine, un marché souvent incontournable où le B2C devrait continuer de croître plus vite, et dépasser le C2C encore largement majoritaire.
Selon l’étude «China's Herculean E-commerce Market» de GroupM, presqu’un quart des Chinois achète en ligne aux toilettes, plus de la moitié ne dort pas pour acheter tard la nuit, et plus de 1 sur 5 dit que leur addiction au shopping affecte négativement leur «harmonie familiale».
Pour Jack Ma, Chairman d’Alibaba, «si dans d’autres pays, le e-commerce est une façon de faire du shopping, en Chine, c’est un style de vie». «Le E-commerce n’est peut être plus une catégorie parce que tout le monde y est» selon Nie Linhai, deputy inspector du Ministère en charge du E-commerce.
 
China's Herculean E-commerce Market (GroupM China)

Des Places de marché incontournables ?

Habillements et accessoires restent les catégories leader de l’achat en ligne, suivis des produits électroniques et biens de consommation durables, enfin, les sacs, produits de beautés, et soins personnels.
Marché gris (produits authentiques vendus sans autorisation des marques) et contrefaçons qui portent tort à l’image de la marque d’un côté, partage des données consommateurs, impossibilité à customiser leur vitrine virtuelle de l’autre, sont les obstacles principaux à l’ouverture d’une boutique sur la plateforme leader Tmall (B2C-Alibaba). Jingdong (JD). Le coût en est un autre.
L’accès aux 300 millions d’acheteurs actifs sur Tmall et Taobao (C2C) convaincrait un nombre croissant de marques, dont Burberry. Pour Exane BNP Paribas, « Les marques de luxe devront être beaucoup plus présentes sur internet, et Tmall est l’un des acteurs les plus professionnels en Chine. D’ici 5 ans, toutes les marques de luxe seront présentes sur des places de marchés ». Alibaba se veut très incitatif en promettant de retirer les contrefaçons une fois l’e-store ouvert, et courtiserait tout azimut les marques de luxe avec l’ambition de créer un site de Luxe sur Tmall, séparant marques haut de gamme et mass market…
Mais beaucoup de marques, notamment Mode et Cosmétiques, ne comptent pas rejoindre la 1ère place de marché (dernièrement l’anglais TopShop a choisi le site Fashion Shangpin). Des millions de consommateurs également en quête d’individualisation, se pressent sur les centaines de sites moins «mainstream», plus «niche», promouvant créateurs chinois et/ou occidentaux, afin de trouver leur style. Les sites discount, flash sales et 2nde main ont le vent en poupe, illustrant la sophistication et le discernement croissants des consommateurs
Suite au «Mi Fan Festival» le 8 avril dernier, le fabricant de smartphones et accessoires Xiaomi serait devenu la 3ème plateforme e-commerce après Tmall et JD: 1,3 million de smartphones et presque 4,8 millions d’accessoires ont été vendus en 8 heures pour un montant de 243M de $: un record en Chine pour une transaction quotidienne chez un e-commerçant indépendant. 
 
Livraison express et paiement «à la carte»

La livraison très rapide et peu chère en Chine contribue à l’engouement pour l’achat en ligne. 
Alibaba sous-traite la livraison de ses produits à des third-party, dont China Post, ce qui lui vaudrait des retards que ne manque pas d’exploiter son challenger Jingdong (JD) qui dispose lui de sa propre «flotte» de coursiers, qui peuvent livrer parfois en moins de 3h. JD les encouragent aujourd’hui à retourner travailler chez eux dans les différentes provinces, afin de répondre à la rapide expansion du e-commerce dans la Chine de l’ «intérieur», et développer ainsi une couverture géographique nationale.
Les services américains UPS et Fedex viennent d’annoncer l’obtention de nouvelles licences pour servir respectivement 33 et 58 villes chinoises, tout en faisant face à la concurrence de China Post, et de compagnies privées tells Shentong Express et S.F. Express (DHL s’est retiré en 2011).
 
China's e-commerce success is in the delivery 

– Cash on Delivery (COD) – de moins en moins – et de plus en plus le paiement mobile via Alipay (Alibaba) Tenpay, WeChat payment (Tencent)… : la praticité comme mot d’ordre.

Les shoppeurs chinois sont les acheteurs les plus mobiles…

Le e-commerce via PC stagne, alors que le m-commerce explose. Toutefois, si les derniers chiffres indiquent que plus de 80% des chinois se connectent à l’internet via mobile, il n’en reste pas moins que 80% y accèdent aussi, et encore, via leur PC. 
D’après le China Mobile Internet Report 2014 (iResearch), le mobile shopping est passé de 0% des revenus mobiles en 2010, à une projection de 44,8% pour 2014, puis 46% annuel jusqu’en 2017.
 
NL988-image-tribune1
 
D’après une récente étude de Caixin, les catégories avec les plus fortes progressions sur mobile sont, le Ecommerce (achats groupés, shopping) et les Paiements/Produits financiers.

NL988-image-tribune2

… plus encore dans la Chine de l’Intérieur, et de l’Ouest

D’après le 2014 Annual Survey of China's Mobile Internet Industry (iiMedia Research), au 1er trimestre 2014, le nombre de mobile search users dans les villes de 2nd rang et en dessous, a atteint 370 millions, soit 80.4 % de tous les mobile search users. L’estimation à 2018 est de 662 millions.
Le rapport Alipay Annual 2013 China Spending Report (Alibaba) indique quant à lui que le Top10 des plus fortes concentrations d’utilisateurs mobiles d’Alipay était dans les provinces rurales telles le Tibet et la Mongolie Intérieure. 

Rural Mobile Commerce is Booming in China

Des tendances confirmées, par le Boston Consulting Group, pour qui dans les 6 années à venir, 3 nouveaux «consommateurs affluents» sur 4 vivront dans les villes de Rang inférieurs (Lower Tiers), et par GroupM, qui indique qu’en termes de ratio achat en ligne/revenu, les consommateurs des villes de Rang 4 étaient les plus gros acheteurs avec 27% de leurs dépenses destiné au Ecommerce.

NL988-image-tribune3

La croissance est là, et la priorité n’est plus à l’expansion dans les villes côtières et de Rang 1, comme Beijing, Shanghai ou Guangzhou.

Les shoppeurs chinois sont les acheteurs les plus sociaux au monde

Les réseaux sociaux intègrent les capacities e-commerce…
Le leader Tencent avec les 829M d’utilisateurs actifs mensuels de sa messagerie instantanée QQ, les 645M de son réseau social QZone, et le lancement à succès il y a 2 ans de sa messagerie WeChat affiche ses ambitions face au leader historique Alibaba. Il a pris cette année 18% du challenger B2C Jingdong (JD), devenu la «shopping channel» de son application star WeChat. L’ecommerçant accèdera ainsi à ses 440 millions d’utilisateurs actifs mensuels. Mi-Août, JD annonçait avoir vendu 574 000 Nokia XL 4G en 5 jours sur QQ mobile
DS par le biais d’une campagne de crowdfunding inédite a vendu 2 500 DS 5LS sur WeChat entre Avril et Juin 2014.
Sina Weibo a intégré son Weibo Payment ou «Wallet» dans son application début 2014, mais expérimentait fin 2012 son service WeiboPay, avec le fabricant chinois de smartphones et accessoires, Xiaomi, qui écoulait 50 000 téléphones en 5 minutes, en ayant accès à ses quelques 400 millions de comptes à l’époque. 
Mercedes-Benz est sans aucun doute la marque automobile à tirer le plus partie du «netizen social» chinois friand de bonnes affaires, et vendait 666 Smart en 9 heures sur Weibo en Janvier 2013, et 388 en trois minutes début 2014 sur WeChat!
 
…les pure players e-commerce intègrent de plus en plus le social business
Il y a plus d’un an, Alibaba acquérait 18%, pour finalement monter à plus de 30% du leader du micro-blogging Sina Weibo, et faciliter aux utilisateurs de la plateforme, l’achat sur Taobao (C2C) et Tmall, et réciproquement.
Alors que son application Laiwang, lancée il y a 1 an doit endiguer l’ascension fulgurante de WeChat, celle-ci ne décolle pas. Mais l’«estocade» a lieu en Février 2014. Jack Ma parle alors de «Pearl Harbour Attack».
Le leader du «Social» Tencent, signe un coup de maître lors du nouvel an chinois: en 9 jours, plus de 8 millions* de chinois connectent leur compte en banque à WeChat et reçevoivent ou envoient de l’argent, via 40 millions** d’enveloppes de papier rouges virtuelles, les traditionnelles «hongbao» (alors même qu’Alibaba avait été précurseur avec les Alipay Hongbao). 
Bien au delà du e-commerce, la bataille entre les 2 géants se poursuit dans la vidéo, le search la télévision, l’entertainment, le gaming, la distribution traditionnelle, la logistique, les taxis, la banque. Et c’est bien pour la conquête du Graal: l’accès aux centaines de millions de «Digital wallets»
Dernière initiative d’Alibaba en ce sens: la signature il y a quelques jours, avec le fabricant de smartphones Huawei d’une solution de paiement à empreinte digitale: la technologie biométrique sera disponible dans son système de paiement Alipay Wallet, alors que le paiement avec QRcode a été censuré au Printemps dernier (sans être réellement appliqué) pour des questions de sécurité. Tencent préparerait lui aussi sa technologie biométrique pour sa solution de paiement Tenpay.
D’autres pure players se sont positionnés d’emblée sur le social commerce avec succès, tels les sites Meilishuo et Mogujie.
 
La montée du O2O

L’investissement d’Alibaba début 2014 dans le réseau Intime Retail Group pour constituer une JV avec shopping malls, department stores et supermarchés, et la mise en place du service de paiement Alipay dans les cinémas et autres petits commerces, la prise de participation de Tencent dans China South Sea City Holdings (entrepôt, logistique), l’annonce cet été par l’e-commerçant Yihaodian de son partenariat avec Sinopec pour mettre à disposition ses marchandises dans +30 000 stations services, ou encore l’annonce il y a quelques jours par Baidu, du lancement de Zhida («Direct Access»), un service offline-to-online de géolocalisation en temps réel, offrant aux marchands de développer une app pour attirer les utilisateurs de smartphones en recherche de services de proximité, sont autant de développements qui illustrent le caractère stratégique du O2O (offline to online, mais aussi online to offline) chez les leaders du web chinois, dans les mois et années à venir. 

NL988-image-tribune4

Les acteurs offline veulent aussi leur part du gâteau digital: le 29 Août, à quelques jours donc de l’entrée en bourse d’Alibaba, le milliardaire Wang Jianlin à la tête du Dalian Wanda Group (cinema, hotel, holidays resorts et retail conglomerate – 107 malls et department stores) annonce la création de «Wanda E-Commerce» en association avec les deux autres géants (et concurrents d’Alibaba) de l’internet chinois, Baidu et Tencent qui fourniront les services O2O au sein des espaces commerciaux du Groupe.
Pour l’homme d’affaires, «il n’existe pas de vraie plateforme online-to-offline en Chine, ainsi, tout le monde a les mêmes chances». Lutte au sommet.

«Haitao» («buying from across the ocean») ou la croissance du Cross border e-commerce

Afin d’éviter les taxes élevées sur les produits étrangers, les acheteurs de «Mainland» passent déjà par des vendeurs étrangers, les «daigou» (petites entreprises/particuliers), qui foisonnent sur le web. Un marché estimé aujourd'hui à 16,23 milliards $. La nouvelle réglementation début Août, imposant la déclaration aux douanes, devrait ralentir, (voire anéantir ?) l’activité de ces derniers, et favoriser au contraire les structures officielles comme Tmall Global.
Amazon.cn a ouvert dans la Free Trade Zone de Shanghai et permet ainsi aux Chinois d’acheter directement sur ses sites internationaux comme amazon.com (plutôt que d’acheter sur amazon.com et payer un service de livraison express).

Déjà 1er marché mondial du Ecommerce avec un volume de transactions qui devrait atteindre $449,24 billion en 2014, le Ecommerce chinois en 2020, devrait être plus grand que les Etats-Unis, l’Angleterre, le Japon, l’Allemagne et la France réunis. 
Le China's State Administration of Taxation a annoncé en Août un projet de taxation des ventes en ligne pour 2015, dont Tmall et JD seraient les premiers assujettis (et dont les répercussions seront sans doute sur le consommateur). 
Pour Jack Ma, le marché connait une «Golden period». « C’est ou le Ecommerce, ou pas de commerce du tout à l’avenir. Dans les 2 prochaines décennies, le e-commerce deviendra probablement l’artisan du succès ou de l’échec d’une marque en Chine. Il est alors important pour les marques de commencer à investir le terrain cette année», selon Tony Chen, President GroupM Interaction, Co-Chairman de la Mobile Marketing Association Chine.

Laure de Carayon, Founder/Ceo China Connect

Formation E-commerce/Marketing Digital Chine le 7 Octobre.
 
*Etude Juin 2014 – Résultats récoltés via mobile de 1 500 utilisateurs Chinois de smartphone dans plusieurs villes de rangs différents (City Tiers).
**les chiffres varient considérablement selon les sources.

La newsletter

Toute l'actualité des médias et de la publicité chaque jour

S'inscrire gratuitement
Newsletter
Adwanted Inscription