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Line Gasparini et Stéphane Delaporte (10 ans de 366) : « Où en serait la PQR sans une régie unifiée ? »

Line Gasparini et Stéphane Delaporte (10 ans de 366) : « Où en serait la PQR sans une régie unifiée ? »
A la tête de 366 depuis 2015, Stéphane Delaporte passera la main à Line Gasparini en fin d'année.

INTERVIEW. Depuis 2015, 366 incarne l’ambition de réunir la presse quotidienne régionale (PQR) sous une même bannière publicitaire, apportant ainsi une offre consolidée et technologiquement avancée aux annonceurs. Dans un secteur en pleine mutation où les médias français se battent pour reconquérir les budgets publicitaires captés par les GAFA, 366 ambitionne de devenir un acteur incontournable du digital en lançant une plateforme technologique à destination des agences et annonceurs. Directeur général depuis la création de la régie, Stéphane Delaporte passera la main, à la fin de l’année à Line Gasparini, DGA depuis 6 ans. Ils ont reçu The Media Leader, au siège de 366 à Paris, dans le cadre d’un entretien croisé où ils dressent le bilan de la décennie et tracent la route pour les 10 ans à venir.

The Media Leader : Dix ans après la création de 366, quel bilan faites-vous de cette aventure ?

Stéphane Delaporte : Si je devais résumer en un point, je dirais que l’initiative de créer cette régie s’est avérée extrêmement pertinente. Lorsque la décision a été prise il y a onze ans, l’objectif était de transformer deux entités qui fonctionnaient indépendamment en un hub unique, au service du marché. Ce hub devait offrir une grande efficacité en matière d’innovation technologique, simplifier l’accès à la PQR et être un moteur stratégique pour le futur de nos actionnaires. En regardant en arrière, on peut se demander où en serait la presse quotidienne régionale (PQR) aujourd’hui sans 366. La réponse est assez claire : sans cette régie unifiée, la PQR aurait sans doute été confrontée à de nombreux défis et serait aujourd’hui dans une situation bien plus complexe.

TML : Sur un plan plus quantitatif, quels résultats avez-vous obtenus ?

S.D. : Nous avons augmenté le chiffre d’affaires de 58%, passant de 75 à 120 millions d’euros, et le nombre de collaborateurs a aussi doublé, atteignant 120 personnes. Par ailleurs, nous avons construit une identité propre à 366, qui n’est pas simplement la somme de marques régionales, mais bien celle d’un média à part entière. Cela nous permet d’intervenir sur des sujets de société et de stabilité démocratique au nom d’un média national. Nous avons également reçu 43 récompenses au cours de cette décennie, ce qui témoigne de la reconnaissance de notre travail, tant sur le plan commercial que de l’innovation technologique. En France, en Europe, et même au niveau mondial, cette approche est unique : nous ne sommes pas seulement un cumul de marques, mais une voix unifiée.

Nous restons indispensables pour porter leurs offres auprès d’annonceurs nationaux qui recherchent la performance et la simplification des dispositifs publicitaires.

TML : Avez-vous des regrets sur ces dix dernières années ?

S.D. : Peut-être, mais davantage en termes de rythme. Nous aurions aimé être plus rapides sur certains aspects, notamment l’élargissement et la massification de nos offres. Avec un collectif de 57 marques, il est parfois difficile d’avancer au même rythme sur tous les sujets. Mais ce n’est pas une critique envers nos actionnaires, qui ont également leurs propres impératifs stratégiques. En comparant notre projet initial et les réalisations actuelles, je pense que nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés. Nous avons vécu cette aventure comme une startup, en construisant quelque chose de nouveau et en suivant des intuitions fortes dès le départ.

TML : Line, après avoir rejoint 366 il y a six ans, vous en prenez la direction générale au 1er janvier. Quel est votre regard sur ces dernières années ?

Line Gasparini : Ce qui m’a frappée dès mon arrivée, c’est que tous les fondamentaux étaient en place. En matière de digital, par exemple, nous avions déjà lancé une DMP, initié l’automatisation programmatique et intégré la data avec l’étude « Françaises, Français ». Ces choix stratégiques nous ont permis d’accélérer ensuite. Depuis, nous avons consolidé notre place en tant que hub d’accès à des contenus de confiance et de proximité, avec un ADN de média de service au quotidien. En parallèle, nous avons aussi axé nos recrutements sur des profils digitaux et de production de contenus, pour rester à la pointe de ce que les annonceurs et le public attendent.

TML : Les groupes de PQR développent de plus en plus d’ambitions nationales : Ouest-France dans la TV ou Ebra dans l’événementiel. Comment arrivez-vous à maintenir l’unité au sein de 366 ?

S.D. : La force de 366, c’est d’unir les marques de la PQR autour de projets communs. Ces groupes régionaux, qui se diversifient dans de nouveaux médias et de nouveaux territoires, comme le lancement d’une chaîne télévisée par Ouest-France ou le rachat de salons par Ebra, ont des ambitions nationales légitimes. Néanmoins, en matière d’exploitation publicitaire, la force de 366 reste centrale. Nous restons indispensables pour porter leurs offres auprès d’annonceurs nationaux qui recherchent la performance et la simplification des dispositifs publicitaires. C’est ce besoin de cohérence qui fait que 366 continue de fédérer l’ensemble de ces acteurs.

La massification de notre offre est cruciale pour nous imposer dans un environnement toujours plus compétitif.

TML : Stéphane, vous allez passer la main à Line en fin d’année. Pourquoi ce choix ?

S.D. : J’ai dirigé 366 pendant dix ans, et nous avons vécu cette expérience comme une aventure entrepreneuriale. Nous avons construit une organisation solide et une feuille de route pour les prochaines années, qui nécessitera trois ans d’efforts pour être pleinement mise en œuvre. Avec Line à la direction générale, nous avons une continuité assurée : elle connaît l’entreprise, le marché, ainsi que ses enjeux stratégiques et technologiques. De mon côté, je continuerai d’accompagner 366 jusqu’en mars pour la mise en œuvre de cette feuille de route. Par la suite, je souhaite me concentrer sur d’autres projets autour de la transformation des marques de la PQR en intégrant des boards par exemple. J’ai des discussions avec certains acteurs.

TML : Justement, parlons de l’avenir de 366 et de cette feuille de route. Quels sont vos objectifs pour les prochaines années ?

L.G. : Nous avons défini le plan « Fast Forward », notre feuille de route pour accélérer les transformations digitales de 366 sur les trois prochaines années. Nous avons trois axes principaux. Le premier concerne la monétisation : il s’agit d’atteindre une taille critique pour rester un acteur incontournable dans un marché en pleine concentration. Le deuxième axe concerne le contenu : nous produisons déjà de nombreuses vidéos et courts formats pour les réseaux sociaux de nos éditeurs, mais nous allons investir davantage dans la production de vidéos verticales et dans le brand content, avec l’arrivée d’Adèle Tanguy, ancienne directrice adjointe de Nice-Matin, qui renforcera cette stratégie. Enfin, le troisième axe porte sur le développement d’une plateforme technologique propriétaire pour renforcer notre souveraineté sur nos inventaires et offrir une expérience utilisateur fluide et complète pour nos clients.

Nous envisageons de recentrer progressivement nos inventaires sur cette plateforme afin de contrôler l’accès à nos données et d’assurer une utilisation optimale de nos audiences de confiance.

TML : La massification de votre offre est un sujet important. Quelles pistes envisagez-vous pour continuer de l’élargir ?

L.G. : La massification de notre offre est cruciale pour nous imposer dans un environnement toujours plus compétitif. Nous avons plusieurs pistes pour renforcer cette dynamique. D’une part, nous allons continuer à intégrer de nouveaux inventaires digitaux issus des marques de la PQR, mais aussi potentiellement des partenaires externes, comme nous l’avons fait avec l’intégration de 20 Minutes dans notre stack publicitaire. Cette intégration rapide, avec une équipe dédiée, nous a montré que nous pouvions rapidement augmenter notre puissance en digital, un enjeu clé. D’autre part, nous explorons des collaborations dans d’autres secteurs complémentaires, comme les radios locales ou d’autres médias régionaux comme l’affichage, afin de créer des offres multimédias. En parallèle, la mise en place de notre plateforme technologique nous permettra également de simplifier l’accès à notre inventaire et de le rendre plus attractif pour les annonceurs nationaux et internationaux. Cela pourrait nous ouvrir des opportunités de synergies avec des éditeurs ou des régies internationales qui partagent nos valeurs de proximité et de confiance. Nous allons d’ailleurs couper l’accès à nos inventaires pour privilégier notre propre plateforme que nous co-construisons avec les agences et les annonceurs.

TML : Cette plateforme technologique est-elle une réponse directe aux GAFA ?

S.D. : Oui, en partie. Cette plateforme intégrera des outils de data, de DSP, de SSP et d’intelligence artificielle pour nous positionner face aux grands acteurs internationaux. Notre ambition est de récupérer la valeur qui, aujourd’hui, échappe aux éditeurs de la presse en raison des intermédiaires. Pour cela, comme Line l’expliquait, nous envisageons de recentrer progressivement nos inventaires sur cette plateforme afin de contrôler l’accès à nos données et d’assurer une utilisation optimale de nos audiences de confiance, ce que les GAFA ne peuvent pas offrir dans les mêmes termes.

TML : Vous avez mentionné une ambition de doubler le chiffre d’affaires. À quelle échéance envisagez-vous d’atteindre cet objectif ?

L.G. : Par exemple, nous avons identifié un besoin de spécialisation pour des segments comme l’automobile ou l’entertainment, qui nécessitent une approche personnalisée pour des stratégies drive-to-store ou de notoriété ciblée. Cette expertise sectorielle sera intégrée en mode matriciel dans notre organisation : chaque expert pourra travailler en collaboration avec les pôles dédiés aux agences tout en développant une compréhension approfondie des problématiques de chaque secteur. Cela nous permettra d’offrir des solutions plus fines, adaptées aux attentes de nos annonceurs et à l’évolution du marché.

TML : Où voyez-vous 366 dans les dix prochaines années ?

L.G. : Dans les dix ans à venir, nous voulons continuer à incarner la presse quotidienne régionale avec une identité résolument moderne, centrée sur le digital et l’innovation. La mission de 366 restera d’être un hub puissant pour les marques régionales, avec des contenus qui inspirent confiance et qui répondent aux attentes de proximité et de transparence de nos audiences. Nous souhaitons devenir un acteur incontournable du digital, en renforçant notre capacité à simplifier l’accès à des contenus premium de qualité. Nos investissements en technologie et en massification nous permettront de rester compétitifs, en phase avec les tendances, et de continuer à transformer la PQR pour qu’elle reste pertinente face aux nouveaux enjeux médiatiques.


Philippe Carli, PDG du groupe Ebra : « 366 a révolutionné la relation entre les annonceurs et la presse régionale »

« 366 a révolutionné la relation entre les annonceurs et la presse régionale. 366 a permis de donner accès aux annonceurs, au travers d’un seul interlocuteur, à la puissance des audiences de la presse quotidienne régionale.

Aujourd’hui, la régie est devenue l’acteur incontournable des régions et des grands groupes, qui peuvent accéder à une offre unique plurimédia à 360°. Elle maîtrise les nouvelles technologies et développe des produits sectoriels toujours plus riches.

Ses enjeux pour l’avenir sont : le développement d’une plateforme technologique unique pour faciliter le travail des agences et annonceurs, l’élargissement de son offre pour répondre à la diversité des communautés de nos territoires, et l’acquisition des compétences technologiques nécessaires à son développement et à celui de la presse quotidienne régionale. »

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