Thomas Jamet / Damien de Foucault : « Faire rayonner l’UDECAM et recréer du désir »
Après l’annonce de la nomination de Damien de Foucault au poste de Directeur général de l’Union des Entreprises de conseil et d’Achat Media, l’organisation fait sa rentrée avec une nouvelle feuille de route et un grand dîner de rentrée demain.
A l’occasion du lancement d’un nouveau grand format d’interviews chaque lundi matin dans 100%Media – la quotidienne, le nouveau président Thomas Jamet et Damien de Foucault ont répondu à nos questions.
100%Media : L’UDECAM fait son big bang en cette rentrée 2022 avec une nouvelle gouvernance et un renforcement de son équipe de permanent ? Pourquoi le faire maintenant ?
Thomas Jamet et Damien de Foucault : Parce que le contexte l’exige : les sujets sont de plus en plus nombreux, notre paysage médiatique connaît un bouleversement sans précédent.
En raison de la concomitance des mandats : nouveau conseil d’administration à l’UDECAM, nouvelles mandatures présidentielle et parlementaire. C’était le moment de tirer profit du formidable travail effectué par notre président sortant, Gautier Picquet, dans le développement de la notoriété de l’UDECAM au sein des nombreuses instances des pouvoirs publics.
100%Media : Dans cette nouvelle gouvernance, comment avez-vous établi les équilibres entre les grands groupes – avec leurs rôles moteurs sur l’ensemble du marché – et les autres acteurs, notamment les indépendants ?
T.J – D. de F : C’est la première fois qu’un président de l’Udecam n’est pas issu d’un des grands groupes. Les vice-présidences et le conseil d’administration sont bien équilibrés avec une juste représentation des indépendants : dans la collégialité, et on pourrait même dire, dans la convivialité.
La bonne représentation de chacun est assurée en bonne intelligence, en proportion de sa taille. Par exemple, la composition du nouveau conseil d’administration illustre parfaitement cet équilibre.
Les commissions également : celles-ci représentent l’ensemble des agences. Il y a une très belle cohésion entre les « poids lourds » du secteur (nationaux et internationaux) et les structures indépendantes. Et cette cohésion est porteuse de très belles synergies. Ce sont ces commissions qui font tout le travail de l’ombre.
100%Media : Damien, vous inaugurez ce poste de Directeur général, quel sera votre rôle dans cette nouvelle organisation ? Quelle est votre feuille de route ?
Damien de Foucault : Cette feuille de route est à la fois très claire et ambitieuse. Tout d’abord, les membres souhaitaient que leur organisation soit incarnée. Qu’elle porte une voix et qu’elle soit représentée par un Directeur général indépendant mais très familier du secteur (sans pour autant nécessairement avoir été patron d’agence). Donc ce sera un rôle de représentation.
Par ailleurs, nous voulons développer le rayonnement de l’UDECAM auprès de l’ensemble de son écosystème. Pour ce faire, il faut recréer du désir. En communiquant beaucoup plus fréquemment qu’auparavant, en développant des actions pédagogiques qui valorisent nos métiers, ainsi que des liens pérennes et réguliers avec le monde universitaire et des écoles.
Enfin, en professionnalisant notre structure : après moi, ce sont trois collaborateurs permanents qui doivent rejoindre l’UDECAM. Nous sommes notamment en recherche d’un(e) Responsable des Affaires Institutionnelles pour pérenniser et développer la notoriété de notre organisation auprès de ce qu’il est convenu d’appeler « les pouvoirs publics ».
100%Media : Thomas, quel sera le rôle du nouveau président ?
Thomas Jamet : Ma mission, comme celle de tous mes prédécesseurs, est de faire en sorte que nous soyons un collectif fort. C’est aussi d’être parfaitement aligné dans la défense des intérêts de nos membres et des marques qu’ils défendent. Il faut pour cela recréer du désir : Damien l’a dit, faire rayonner l’UDECAM, c’est ce qui va permettre à nos métiers de générer le regain d’intérêt qu’ils méritent.
100%Media : Parmi les grandes évolutions, vous avez décidé de mettre fin à la formule de grande journée des Rencontres de l’UDECAM qui marquaient la rentrée. Pourquoi ? A quoi vont ressembler les rendez-vous débats plus resserrés ?
T.J – D. de F : Nous n’y mettons pas fin, bien au contraire ! Les Rencontres de l’UDECAM changent de format mais sont renforcées : c’est désormais quatre rendez-vous que nous donnons au marché tout au long de l’année, au lieu d’un.
Le top départ est donné par un dîner (demain, NDLR), certes, plus resserré puisqu’il rassemble les grands annonceurs, les patrons des médias et des agences média ainsi que les représentants d’organismes institutionnels.
Mais ça reste un marqueur fort de la rentrée. Ce sera moins la cohue en marge des conférences habituelles et nous aurons beaucoup plus d’annonceurs.
Ensuite, ce seront trois conférences, à raison d’une demi-journée chacune, où quelques centaines de personnes seront traitées et elles seront ouvertes à tout le marché. La première aura lieu le 15 novembre 2022 sur le thème du défi que connaît le trading media, efficacité et agilité dans la complexité. La deuxième le 14 février 2023 sur « Les Enjeux Digitaux et Techniques du métier ». La troisième le 16 mai 2023 sur la RSE : mission d’intérêt général pour la communication.
En outre, l’ensemble du contenu de ces rendez-vous sera rendu disponible au travers d’une plateforme accessible à tous.
100%Media : Comment voyez-vous l’évolution du métier d’agences média alors que certains acteurs, notamment digitaux, essayent d’ubériser le marché en entrant directement en contact avec les annonceurs ? Les silos TV / radio / digital / presse ont-ils encore un sens ?
T.J – D. de F : Le métier d’agence média est très challengé. Mais ça n’est pas nouveau !
L’agence média est, par définition, le partenaire de la marque qui doit démontrer la plus grande flexibilité. L’agence média fait en permanence la preuve de sa faculté à acquérir de nouvelles disciplines, à accueillir de nouvelles méthodologies ainsi qu’une grande diversité de modes d’achat, à développer des modèles de mix marketing…
C’est précisément parce que les acteurs sont nombreux à essayer d’« ubériser » le marché que les marques ont besoin d’un partenaire de confiance, neutre, expert et objectif pour, dans la tempête ou dans le foisonnement, et les sollicitations de « leviers marketing » de plus en plus nombreux, gérer cette étourdissante diversité tout en continuant d’optimiser en permanence leurs investissements publicitaires.
Un partenaire également soucieux de la diversité de l’écosystème des médias, et capable de travailler avec une grande agilité. Regardez comment les agences média ont fait preuve de résilience et de flexibilité avec les clients annonceurs pendant la pandémie, en gérant au plus près les prises de parole (ou les suspensions de prise de parole) des marques dont elles avaient la charge.
L’histoire récente a montré que des marques qui souhaitaient internaliser leurs ressources en achat d’espace ont dû se doter d’équipes digitales bientôt pléthoriques pour pouvoir se connecter à toutes les plateformes du marché, développer des outils de reporting qui tiennent compte de cet écosystème en évolution permanente, former régulièrement les ressources qu’elles avaient recruté pour, en définitive faire machine arrière et revenir au choix d’une agence média.
Faire gérer ses investissements publicitaires par son département des achats, ce n’est pas impossible, c’est juste dangereux et pas forcément moins cher.
Les silos quant à eux, n’ont plus vraiment de sens, c’est vrai, mais ils demeurent tout simplement parce que les mesures sont encore silotées. Les agences se sont déjà dotées, pour la plupart, de modèles d’optimisation pluri-média.
100%Media : Le marché publicitaire a plutôt résisté au premier semestre 2022 dans un contexte économique et géopolitique très incertain. La croissance semble ralentir sur 2022 mais reste soutenue. Ces prévisions montrent-elles une résilience, un simple effet retard ou un trompe l’œil lié à la vigueur des géants du web ?
T.J – D. de F : C’est un peu tout cela à la fois. Oui, c’est certain, les géants du web sont les principaux responsables de cette croissance (en tout cas, si l’on en croit les chiffres fournis par l’Observatoire de l’epub et le BUMP).
Au-delà du paradoxe que vous soulevez, ces chiffres démontrent que les marques et leurs agences média sont en train d’intégrer l’incertitude ambiante comme un paramètre de leur équation. Les marques elles-mêmes deviennent, à l’instar de leurs agences médias, extrêmement agiles. Au passage, c’est la même agilité que nous demandons à nos interlocuteurs du côté des régies… avec plus ou moins de succès.
Notre monde est incertain, notre façon de travailler se déstructure pour se restructurer différemment, ce sont là des données qu’il faut intégrer à sa stratégie mais ce n’est surtout pas une raison pour suspendre ou ajourner sa stratégie. On s’adapte, on essaie d’anticiper.
Une marque qui cesse d’investir en communication, c’est une marque qui se meurt. Des exemples récents ont montré que dès qu’une marque cesse d’investir en publicité, sa part de marché s’effondre.
100%Media : Parmi les dossiers chauds, la fusion TF1 / M6 sera au cœur de cette rentrée. Alors que plusieurs organisations se sont déjà positionnées, comme l’Union des Marques, quelle est la position de l’UDECAM ? L’Autorité de la concurrence doit-elle inclure le marché pub digital dans son calcul de part de marché du nouvel ensemble TF1 / M6 ?
T.J – D. de F : La position de l’UDECAM doit impérativement être le reflet de celle de ses membres. Or tous ne sont pas totalement alignés.
Il n’y a pas, au sein de notre organisation, une hostilité farouche à ce projet, il y a juste des positions qui varient entre l’enthousiasme à l’idée de créer un géant national et, disons une certaine méfiance ou en tout cas, une certaine forme de scepticisme. Notamment en ce qui concerne les garanties censées prémunir les annonceurs contre une baisse de leur pouvoir d’achat.
Dans ce contexte, la position de l’UDECAM est claire : ce n’est pas à notre organisation d’énoncer les conditions dans lesquelles ce projet pourrait se réaliser, ni encore moins d’exprimer une opinion en faveur ou en défaveur de ce projet. C’est à l’Autorité de définir le marché. Et pour l’y aider, notre rôle consiste à animer les débats au sein de nos instances et surtout à mobiliser nos membres afin qu’ils fournissent leurs réponses individuelles dans les délais impartis.
100%Media : La RSE, notamment les enjeux environnementaux, va être l’un des autres grands sujets des années à venir. La publicité est souvent pointée du doigt. Il y a beaucoup d’initiatives ici et là sur le marché… En quoi l’UDECAM peut-elle prendre sa part ?
T.J – D. de F : L’UDECAM veut prendre toute sa place dans ce débat. Du reste, l’enjeu est double pour l’UDECAM car, en tant qu’organisation professionnelle, elle a vocation à faire valoir les bonnes pratiques au sein de la profession dont elle défend les intérêts, mais en outre, les Agences Media qu’elle représente ont pour mission de porter la voix des marques dans les médias, et sur les réseaux sociaux notamment.
En d’autres termes, les Agences Media ont, en matière de RSE en général et d’environnement en particulier, un impact pour elles-mêmes mais également pour les marques en ce qu’elles s’efforcent d’optimiser la diffusion des messages de celles-ci.
D’ailleurs, l’UDECAM a créé, il y a quelques années déjà une Commission RSE qui a déjà été à l’origine d’un certain nombre de publications sur les bonnes pratiques dans de nombreux domaines de la RSE.
A titre d’exemple, actuellement, l’UDECAM est en train de mobiliser ses membres afin qu’ils répondent, dans des délais très courts, à la récente sollicitation du Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires autour des propositions qu’elles pourraient formuler en matière de sobriété énergétique.
Enfin, l’UDECAM organise le 16 mai prochain, une demi-journée de conférences rassemblant toute la profession autour de cette thématique majeure, et qui a pour intitulé : « RSE : Mission d’intérêt général pour la Communication ».
A cette occasion, nous publierons une grande étude dont nous sommes les commanditaires auprès du cabinet Glimpact.
Propos recueillis par François Quairel
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