Corinne Mrejen (Les Echos – Le Parisien Médias) : « Nous lançons Amplify B2B, notre hub de solutions dédié aux cibles pro »
INTERVIEW DU LUNDI. Si la presse n’a pas retrouvé son niveau de 2019, une dynamique générale de modernisation se fait entendre. La régie des Echos – Le Parisien, boostée par les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 et la couverture assurée par Le Parisien, lance sa rentrée avec nouveaux projets. Les Echos – Le Parisien Médias renforce sa présence sur le marché et met une deuxième jambe dans le B2B en lançant son hub dédié : Amplify B2B. Corinne Mrejen, directrice générale du pôle partenaires du groupe Les Echos Le Parisien et Chief Impact Officer, nous présente, en exclusivité, cette nouvelle solution.
The Media Leader : Selon le Bump, au 1er semestre 2024, la presse est proche de l’équilibre à -1% par rapport au S1 2023, mais elle reste éloignée de son niveau du S1 2019, à -19%. Comment l’analysez-vous ? Quelle est la tendance aux Échos – Le Parisien Médias ?
Corinne Mrejen : Alors que le marché affiche une légère décroissance, notre régie connaît une progression qui frôle les deux chiffres. Ces bons résultats sont liés à trois facteurs déterminants. En premier lieu, notre structure de chiffre d’affaires avec une part importante des Opérations Spéciales, qui ne cessent de progresser et nous assurent un socle solide de CA. En deuxième lieu, le fort développement éditorial des écritures vidéo et podcast, avec une bonne transformation en termes de monétisation. En troisième lieu, une actualité qui nous a été très favorable : un marché qui s’est structuré autour des Jeux olympiques et paralympiques, avec des partenaires présents dès 2023 et des résultats historiques pour Le Parisien.
Plus globalement, la stratégie de valeur que nous menons depuis longtemps, liée aux grandes marques de référence que nous commercialisons, nous permet d’afficher des résultats supérieurs à ceux de 2019. Dans un marché qui tire les prix à la baisse, la qualité de nos contenus et de nos inventaires, le développement des nouvelles écritures éditoriales (vidéo et audio) et la puissance de nos audiences nous permettent de maintenir la valeur de nos supports, sur le print comme sur le digital, et de transformer la structure de notre CA, avec un poids croissant des OPS et du numérique.
The Media Leader : Quel bilan faites-vous des JOP ? La rédaction du Parisien s’était réorganisée pour l’occasion. En était-il de même pour la régie ?
C.M : Le groupe Les Echos-Le Parisien s’y prépare depuis deux ans. 200 journalistes ont été mobilisés pour une couverture exceptionnelle de cet événement planétaire. Il y a eu une véritable ferveur de la part des équipes de la rédaction comme des lecteurs, à la hauteur du tournant qu’ont été les Jeux pour notre pays. En interne, cela a eu une vertu de team building, de cohésion inouïe. Paris 2024 a été un accélérateur pour Le Parisien, qui est le seul quotidien généraliste à avoir cette légitimité sur le sport, mais aussi sur tout ce qu’il y a autour : héritage, partage, transmission, travail, persévérance. Les JO et JP ont été l’opportunité de révéler ce qu’était la France, ce qu’elle traversait et ressentait. Le Parisien, c’est le parfait reflet de la France.
Nous poursuivons notre stratégie de transformation du CA en priorisant nos leviers de croissance
Fort de tout cela, le bilan ne pouvait être qu’excellent tant sur le plan de la diffusion que sur le plan publicitaire. Pour donner quelques chiffres, Le Parisien a enregistré plus de 150 000 ventes supplémentaires sur la période. Le numérique a atteint 112 millions de visites en juillet, un record depuis janvier 2021. La vidéo a totalisé 305 millions de vues en juillet, un record historique
Les Echos Le Parisien Médias a naturellement prolongé la mobilisation du Parisien, là aussi avec des résultats historiques en print comme en digital, en classique aussi bien qu’en OPS. À fin août, notre CA publicitaire sur Le Parisien était en hausse de +21% par rapport à l’année passée.
Notre régie est par nature polyvalente, multimarques. Aussi, nous n’avons pas eu besoin de faire évoluer notre organisation pour assurer un accompagnement spécifique pour les annonceurs, proposer de nouvelles offres, nourrir le marché avec des insights issus de nos études propriétaires « Au détail Près » sur l’Olympisme. Nous avons largement misé sur des dispositifs sur-mesure, sur la singularité de nos marques médias pour Paris 2024. Nous avons notamment mis en lumière l’Héritage des Jeux, ses coulisses, le caractère festif ou encore le formidable élan de fierté et d’euphorie porté par les Paralympiques.
Ces Jeux ont rendu visible auprès de l’ensemble de nos partenaires la légitimité, le savoir-faire du Parisien sur le sport, première rédaction sportive de la Presse Quotidienne Généraliste, et les dispositifs sur-mesure que peut proposer la régie. Ils ont également confirmé la stratégie que nous développons autour de nos marques médias qui consiste à travailler la singularité et le sur-mesure.
The Media Leader : Quelles sont vos pistes pour maintenir ce niveau de performance ?
C.M : Nous poursuivons notre stratégie de transformation du CA en priorisant nos leviers de croissance et en capitalisant sur nos spécificités : le sur-mesure, l’audio-vidéo, le sport avec une ambition renouvelée pour Le Parisien.
Nous innovons toujours sur notre proposition de valeur, notamment via SONAR, notre écosystème data : déploiement de nouveaux segments first-party et zero-party, enrichissement de l’offre avec la technologie Data Clean Rooms de Decentriq.
En parallèle, nous poursuivons la transformation de notre modèle via la formation continue de nos équipes. C’est en garantissant la plus grande qualité d’expertise, d’accompagnement et d’exécution aux agences et aux annonceurs que nous consolidons le caractère unique de notre régie. Le recrutement de profils experts dans le numérique, le conseil et les OPS est central. C’est aussi pour cela que nous lançons un programme de formation dédié à l’intelligence artificielle, adapté aux besoins de nos collaborateurs pour répondre au mieux aux attentes du marché.
Profeel 2024 est la première brique de notre hub
Dernier enjeu et non des moindres, nous structurons notre proposition de valeur sur le B2B, en lançant un hub de solutions spécifiques, qui s’appuie sur la légitimité de nos marques, leurs contenus et leurs audiences. Nous proposons ainsi des insights, des expertises, et des activations, pour s’adresser aux différentes communautés de décideurs.
The Media Leader : Vous venez de publier une étude B2B, avec Publicis Media Pro, portant sur les décideurs. Quels enseignements tirez-vous de cette étude ? Avez-vous été étonnée des résultats ?
C.M : Cette étude Profeel 2024 est la première brique de notre hub. Deux constats ont été à l’origine de son lancement. Le premier, le terme « décideurs » décrit une cible multiple, avec des réalités très hétérogènes. Le quotidien d’un dirigeant de PME est très différent de celui d’un membre du Comex du CAC 40. Second constat, le marché B2B manque d’insights détaillés. C’est pourquoi nous avons initié cette étude (menée auprès de 600 du secteur privé) en collaboration avec Publicis Media Pro et l’institut Opinion Way, dans l’optique d’apporter un éclairage nouveau et granulaire sur le sujet. L’enquête approfondit la connaissance de chaque typologie de décideurs et déchiffre les réalités qui impactent leur état d’esprit et leur prise de décision, parfois à l’encontre d’idées reçues.
Il en ressort, et c’est une bonne nouvelle, que les décideurs sont dans un état d’esprit positif. Ils se sentent engagés, déterminés et optimistes. Une grande partie (86%) trouve du sens dans son travail et considère supportable le niveau de pression propre à sa fonction. Toutefois des signaux de fragilité subsistent, autour de la fatigue et du déséquilibre vie pro/vie perso, du poids des contraintes budgétaires et légales, et des équipes réduites. En parallèle, l’isolement inhérent à la fonction de dirigeant est aussi l’un des aspects soulignés. Il se matérialise notamment lors de la prise de décision, avec 2 décideurs sur 3 qui concèdent prendre des décisions stratégiques sans disposer des informations suffisantes. C’est un chiffre marquant car il fait ressortir le besoin d’accompagnement, avec comme principaux enjeux le développement économique, l’humain et le digital.
Les décideurs surconsomment tous les types de médias, pour mieux comprendre, pour se détendre, et notamment les marques de presse, en print comme en digital.
Dans ce contexte, les médias jouent un rôle stratégique. Les décideurs surconsomment tous les types de médias, pour mieux comprendre, pour se détendre, et notamment les marques de presse, en print comme en digital. Il est intéressant de regarder le rôle spécifique attribué à la Presse. Au-delà de la dimension d’expertise et de savoir (pour 81%, la presse papier et digitale se distingue par sa capacité à faire gagner en compétence), on découvre une dimension de personnal branding (68% souhaitent être les premiers à relayer une information).
Nos marques médias s’inscrivent dans cette dynamique. Les Echos est reconnu pour sa fonction de compréhension des enjeux complexes comme pour sa fonction d’expertise et de construction d’une culture. Le Parisien est apprécié pour sa capacité à faire progresser et à donner des clés pour agir, autant que pour sa fonction de distraction. Ce sont donc les parfaits relais pour s’adresser à ces cibles.
The Media Leader : Comment Les Echos – Le Parisien Médias peuvent approfondir cette relation avec les décideurs ? Faut-il accélérer sur le B2B ?
C.M : Je voudrais d’abord clarifier ce mot B2B. Pour notre régie, le B2B correspond aux communications à destination de la sphère professionnelle et des décideurs en entreprise, quel que soit le type d’annonceur : Automobile, IT, Plateformes, Banque-Finance, Assurances-Mutuelles, Services aux entreprises, etc. C’est un marché important, avec 1,6 milliard d’euros d’investissements publicitaires plurimédia en 2023 (source Kantar), qui a conscience de l’efficacité de la Presse (deuxième média investi en B2B).
Notre savoir-faire sur le marché B2B est historiquement établi et reconnu, grâce d’abord à l’écosystème des Échos et plus largement grâce au leadership éditorial de nos marques médias Le Parisien, Investir, Boursier.com, etc.
Nous avons la légitimité (image, statut). Nous avons les contextes (inventaires, contenus). Nous avons les audiences et les capacités de ciblage. Nous avons les ressources expertes. En complément, l’étude Profeel 2024 nous permet de renforcer notre compréhension des aspirations des décideurs. Nous mettons tout cela à disposition de nos partenaires, pour mieux les conseiller dans la réflexion et le déploiement de leurs communications B2B. Maintenant, notre enjeu est de structurer et d’élargir notre offre, tout en garantissant un point d’entrée unique. C’est pourquoi nous lançons Amplify B2B, notre hub de solutions dédié à ces cibles « pro », des TPE aux Grandes Entreprises.
The Media Leader : Pouvez-vous nous détailler en quoi consiste Amplify B2B ?
C.M : Amplify B2B repose sur quatre grands piliers d’accompagnement. Le premier pilier « Data et Inventaires » est dédié aux nouvelles offres de ciblage 100% business pour toucher des cibles ultra-premiums parmi nos communautés de décideurs. Nous inaugurons à l’occasion de ce lancement le ciblage « B2B Executives Leaders » qui adresse exclusivement les décideurs B2B abonnés et sur-consommateurs des Echos. Ces contacts qualifiés représentent 7 décideurs sur 10 (en Grandes Entreprises CAC 40 ou SBF 120), et 2 membres sur 5 des instances de gouvernance (COMEX, CODIR, Board).
Le deuxième pilier « Lead Generation » regroupe les offres conçues pour générer des leads qualifiés auprès de décideurs B2B, en partenariat avec nos médias experts. Notre accompagnement est complet et répond aux exigences spécifiques de chaque cible : phase d’idéation, A/B testing, production des assets, médiaplanning et achat d’espaces, Monitoring. Un cas concret avec notre offre « B2B Lead Gen InFinance ». Nous avons noué un partenariat stratégique avec Story Jungle, le seul producteur de contenus certifié par LinkedIn en France. Nous proposons une offre de Lead Generation (prospects CSP++) notamment sur des fonctions de CFO/DAF, via différents lead magnets conçus pour performer sur LinkedIn (livres blancs, lives, webinars, cases studies…).
Avec le troisième pilier « Contenus », nous déployons notre savoir-faire brand content. La production des contenus B2B est organisée par thématique sectorielle (comme l’hydrogène ou la gestion de patrimoine). Nous mettons à disposition nos ressources expertes (rédacteurs, social media specialists, graphistes, etc.) et proposons une sélection de formats premiums (print, vidéo, études, e-mail marketing, social media, événementiel, etc.). Chaque dispositif est médiatisé sur notre écosystème média de façon optimisée grâce à nos solutions data. Nos offres pourront s’appuyer sur l’expertise d’autres entités du Groupe Les Echos Le Parisien comme Les Echos Publishing ou proches du groupe à l’image de l’institut Opinion Way.
Chaque dispositif est médiatisé sur notre écosystème média de façon optimisée grâce à nos solutions data.
Enfin, le quatrième et dernier pilier « Influence » conjugue la valeur de nos contenus, de nos audiences et l’influence de nos médias sur toutes les plateformes sociales. Nous identifions et fédérons nos communautés de top décideurs/leaders d’opinion, pour proposer aux annonceurs des campagnes de marketing d’influence B2B. Nos territoires d’influence peuvent s’appliquer à tous les secteurs et tous les métiers (l’IA-Tech, RSE-Inclusion, l’Entreprenariat, la Banque-Finance-Assurance, Santé-Pharma, Transport-Logistique ou Énergie) ou faire émerger des communautés inspirantes (Femmes Dirigeantes, etc.). Chaque pilier sera enrichi d’offres packagées clés en main, comme d’offres entièrement sur-mesure.
Paris Match sera géré à côté du groupe Les Echos-Le Parisien
The Media Leader : Au 1er octobre Paris Match vous rejoint et pourrait faire son apparition dans vos offres début novembre. Comment s’intègrent-elles dans vos offres existantes ?
C.M : Notre PDG, Pierre Louette s’est récemment exprimé sur cette annonce en précisant que Paris Match sera géré à côté du groupe Les Echos-Le Parisien. Le magazine bénéficiera d’une entité juridique différente et d’une autonomie. Je vous confirme que nous sommes heureux de pouvoir assurer la régie de Paris Match à partir du 1er janvier. Pour le reste, il est trop tôt pour en dire plus.
The Media Leader : Les annonceurs semblent friands des offres publicitaires RSE, pourtant malgré le discours, ces dernières se trouvent en bas des plans médias et ne rencontrent pas le succès escompté. De quel œil voyez-vous cette fracture entre le discours politique et les faits ?
C.M : Il y a effectivement eu légèrement moins de communications RSE selon la dernière pige Kantar. C’est un fait, mais qui doit être très largement nuancé et remis dans une perspective plus globale. Si le nombre de messages est en retrait, l’implication des annonceurs et l’organisation du marché prouvent que la RSE est au cœur des décisions.
Un point pour expliciter la donnée Kantar concernant les messages. Au premier semestre, l’inflation est remontée au rang des principales préoccupations des Français, avec comme effet de réorienter les communications tactiques de certains annonceurs. En parallèle, les acteurs publics, le gouvernement, ont eu la nécessité d’adresser d’autres grandes problématiques de santé publique ou de sécurité routière.
Ce n’est pas parce qu’il le fait à bas bruit, que le marché ne s’organise pas en faveur d’une publicité plus durable et vertueuse. J’en veux pour preuve le grand nombre d’initiatives provenant des interprofessions, des annonceurs et des agences. Je pense évidemment au programme « Sustainable Digital Ad Trust » du SRI qui valorise les transitions des régies en faveur d’une publicité digitale plus responsable, et qui fédère une large majorité des adhérents.
Je salue également les places de marché programmatiques responsables des agences (la « French Touch » d’Havas, « Back to News » de GroupM), pour flécher les investissements vers les éditeurs français engagés pour un journalisme de qualité. Ou encore leurs initiatives pour éclairer leurs collaborateurs et clients (l’IA anti-greenwashing de Publicis, « Dentsu sw!tch club » de dentsu).
Sur les problématiques de climat et de carbone, je pense au lancement du référentiel de mesure carbone pour la publicité en presse du SRP.
Les Echos Le Parisien Médias continue aussi de porter cet effort de transformation responsable. Nous avons bien évidemment intégré le SDAT du SRI, nous poursuivons la rationalisation de notre chaîne de valeur programmatique avec Greenbids, nous travaillons avec DK pour automatiser la mesure de l’empreinte carbone de nos campagnes…
Au-delà du nombre de parutions, la responsabilité est pour l’ensemble de notre écosystème un axe de travail et de progrès majeur, dont le scope s’élargit de plus en plus (avec une part nouvelle donnée au social et sociétal aux côtés des enjeux environnementaux).
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Sous les stands, la plage. Un décor particulier pour engager la discussion autour de la responsabilité, la durabilité et la frugalité. Ce sujet, on ne peut plus actuel, était sur toutes les langues en 2023. Aujourd'hui, qu'en est-il ? Quelle est la place de la sustainability aux Cannes Lions et dans les médias ?
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