L’ÉDITO de The Media Leader Dimanche du 2 juin 2024
Autant vous le dire tout de suite, je suis vexé. Et un peu jaloux. Vous n’y êtes pour rien, rassurez-vous. C’est juste « Vieux », ce magazine lancé cette semaine par CMI et dirigé par Antoine de Caunes, qui me chagrine. Parce que je le suis ? Oui, un peu, forcément. Mais pas seulement. J’aurais tellement aimé avoir l’idée. Jusqu’à présent les magazines pour les seniors faisaient l’effort, certes vain, de camoufler leur approche avec des titres flous – « Notre Temps », « Pleine Vie » ou même « Peps » – pour séduire en estompant les rides.
Personne n’était dupe mais là, le nom du nouveau venu sonne un peu comme une claque. Je sais bien qu’Antoine est encore plus vieux que moi (à partir d’un certain âge, on ne peut pas s’empêcher ce genre de remarque) et qu’il est par conséquent encore mieux placé que moi pour parler de cet état. Lequel n’est au fond pas si désagréable, ne serait-ce que parce qu’il prouve qu’on est en vie. Mais quand même, j’aurais aimé être associé à cette démarche, ne serait-ce qu’en tant que jeune membre du club. J’aurais pu proposer toute une série de déclinaisons comme un hors-série Vieux Cons (puisqu’on est dans le brutal, autant continuer) ou une version féminine dont je vous laisse deviner le titre. Sans oublier les suppléments beauté et les salons dont je vois d’ici les noms s’afficher en grand sur les ponts du périphérique Porte de Versailles.
La tendance démographique étant ce qu’elle est, la vague vieille va inévitablement recouvrir notre société qui se rêve pourtant dans la jeunesse éternelle. Il est vrai que comme le dit depuis des années mon ami Serge Guerin, grand spécialiste de la question*, on ne se sent jamais vieux, tout simplement parce que l’on ne ressemble pas aux seniors de notre jeunesse (vous me suivez ?). Mais comme ce nouveau canard (c’est un vieux terme pour journal) prétend ne pas s’adresser uniquement aux anciens mais veut « réfléchir et interpeller les pouvoirs publics pour que les grandes questions qui concernent les vieux ne leur soient pas confisquées », il est promis à un avenir radieux. On ne peut donc que lui souhaiter une longue vie.
*Auteur de « Et si les vieux aussi sauvaient la planète ? », Éditions Michalon
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